Tony Joe White – Live In Amsterdam

2 Disc Set - CD + DVD / Munich Records
Blues

Comme si de rien n’était, le vieux renard des marais nous a concocté une incroyable surprise en cette fin d’année 2010 avec non seulement la sortie d’un (nouvel) album studio, mais aussi la sortie d’un coffret CD + DVD qui nous propose de revivre le fameux concert donné le 6 novembre 2008 au Paradiso d’Amsterdam, quelques jours à peine avant son passage à Paris.

Dès le premier titre, ‘Rich Woman Blues’, le ton est donné, et cela vous prend aux tripes, direct. La voix chaude, brûlante, ne jaillit pas de vos enceintes, elle les enveloppe, les envoûte, les efface pour que seule reste cette voix, et quelle voix. Une voix qui s’affirma il y a cinquante ans, en 1969, avec ‘Polk Salad Annie’, titre que l’on retrouve avec bonheur sur les deux galettes, CD et DVD, juste avant le phénoménal ‘Steamy Windows’, hit planétaire interprété par la lionne Tina Turner.
Aux jeunes générations qui découvrent le personnage, il faut le dire et le redire, Tony Joe White fut chanté par Tina Turner, oui, mais aussi par Etta James, Elvis Presley et Ray Charles. Qui n’a pas frissonné, ou chialé, en écoutant Ray chanter ‘Rainy Night in Georgia’…? Une titre signé Tony Joe White, hé oui, et que notre vieux renard des bayous nous interprète également ici.

La vieille guitare crache son Swamp Blues saturé, crade et rutilant à la fois, laissant l’harmo s’envoler comme un oiseau au dessus des marécages. ‘As the crow flies’ chante Tony, le Stetson enfoncé sur la tête. Le vieux renard est malin et il sait ce qui vous fera le plus grand bien: ‘You’re gonna look good in blues’. Sûr qu’en plongeant dans un blues comme celui du bon vieux Tony on ne peut que se sentir bien, et même très bien. Et après avoir croisé ‘Roosevelt and Ira Lee’ on se laisse glisser dans les marais dans lesquels nous emmène le renard. Avec ‘Feeling snakey’ on se sent serpent et on se sent surhumain, comme si plus rien ne pouvait nous échapper…avant que l’émotion ne nous submerge à nouveau, lentement mais sûrement, avec ce monumental ‘Rainy Night in Georgia’. Perdu en plein marécage, sous cette pluie qui nous tombe dessus, les années et les souvenirs en plus, on craque et l’émotion nous fait craquer tandis que le vieux renard nous guette, planqué derrière ses lunettes noires. Putain d’album…, putain de mec que ce Tony. Y’avait des dizaines d’années qu’on n’était pas arrivé à me faire chialer… Fallait que ce soit sur cet album là.

Plus beau, plus magistral, plus lumineux qu’une simple compilation, ce concert du 6 novembre est non seulement un condensé de chansons devenues incontournables, de hits inoubliables, mais aussi un véritable monument-hommage à un personnage qui a profondément marqué la musique de ces 50 dernières années.

Et comme le signe ce brave Tony Joe White en titre de chanson : ‘The guitar don’t lie’.

Hé oui, faut le dire, putain de mec que ce Tony, et putain d’album. Un des indispensables de ces cinquante dernières années, tout simplement.

 

Le vieil alligator vient de nous gratifier d’un nouvel album studio dont nous venons à peine de nous remettre qu’il sort dans la foulée ce CD/DVD ‘live’ au Paradiso d’Amsterdam. Cela se passait en 2008, le 6 novembre, très exactement. Et quelques jours plus tard, le 11 novembre, il était chez nous, au New Morning, en concert quasiment privé, et cela avait été un grand moment! Il nous avait déclaré à cette occasion qu’il aimait bien jouer avec le batteur Jeff Hale car ensemble, tous les deux, ils n’avaient jamais besoin de ‘setlist’ car tout se passait au feeling, réagissant aux vibrations que leur procurait le public.
Je ne sais pas s’il en fût de même au Paradiso, ce 6 novembre, puisqu’un troisième musicien est de la partie, Tyson Rogers, qui officie au clavier. Alors que le nouvel album studio, ‘Shine’, ne contient que de nouvelles compositions, ce ‘live’ ne comprend, lui, que des morceaux devenus des classiques du répertoire de l’artiste. Cela va de ‘As The Crow Flies’ à ‘Roosevelt and Ira Lee’, en passant par ‘The Guitar don’t lie’, ‘Rainy Night in Georgia’, ‘Polk Salad Annie’ ou ‘Steamy Windows’.
Il faut dire qu’avec une trentaine d’albums à son actif, le Tony a trouvé matière à extraire des morceaux devenus des standards du genre. Cela s’écoute n’importe quand et n’importe où, mais l’ajout du DVD dans ce coffret nous permet également de visionner ce concert, histoire de se remémorer la silhouette inoubliable de l’artiste: un Stetson sur la tête, des lunettes noires lui dissimulant les yeux, le porte-harmonica solidement fixé aux épaules et la vieille Stratocaster à la main. Tony a même changé de santiags depuis la dernière fois où il était affublé de bottes en croco car cette fois-ci, il porte des bottes en cuir d’autruche. Et toujours cette présence sur scène, ce charisme naturel qui lui confère une stature remarquable. Tony Joe White fait partie de ces artistes qui traînent une aura quasi mystique et surnaturelle. Le moindre de ses mouvements est ressenti comme un geste unique et susceptible d’entraîner un séisme.
Un album à écouter, c’est sûr, mais aussi à regarder. Avec ce respect que l’on doit à un grand bonhomme.

Dominique Boulay
Paris-Move & Blues Magazine
Tony Joe White