Blues-Rock

THE SIDESHOW TRAGEDY – D’entrée de jeu, ces lascars s’y entendent pour brouiller les cartes: “Lost Time”, “Afraid To Fall” et “Nobody” s’arc-boutent ainsi sur une batterie aussi butée que celles qui backaient Creedence et Tony Joe White, tandis que la guitare scande des riffs stoniens en soutien de vocaux évoquant l’ultime fantasme œdipien: Lou Reed ânonnant des lyrics écrits par Elliott Murphy et Peter Perrett… Quant à “Piston Blues”, on jurerait y entendre le Dylan de “Maggie’s Farm” bousculé par la slide incandescente d’un jeune Johnny Winter, tandis que “Trust” et “Time To Taste” déroulent un swamp funk de bonne facture, comme si on avait largué James Chance en plein Bayou. À ce stade de l’écoute, on enclenche la touche “pause”, pour se demander franchement d’où pareil gumbo peut bien nous parvenir… Certes, ça pue le Sud amerloque par tous les pores, mais Fogerty nous avait déjà fait le coup depuis la baie de Frisco. Alors on se fade le copieux dossier de presse, et passé la blague de rigueur destinée aux chroniqueurs du Figaro et de Télérama (THE SIDESHOW TRAGEDY – “le nom du groupe est inspiré d’un poème de Rimbaud”), on loge enfin ces zigotos avec précision. Si l’album fut enregistré dans l’État de New-York, le duo nucléaire que constituent Nathan Singleton (guitares, vocals, basse) et Jeremy Harrell (batterie et tout ce qui lui tombe à portée de sticks) est basé à Austin, Texas. Sur le papier, ça évoquerait les Black Keys et autres Left Lane Cruiser, mais l’énergie mise à part, rien ne rapproche ces deux-ci de ces quatre-là. Leur “For Your Love” se réfère en effet davantage à Iggy et aux premiers Modern Lovers qu’aux Yardbirds, voire à toute connotation rurale que leur origine et leur pochette pourraient suggérer. Sombre, lyrique et sépulcrale, THE SIDESHOW TRAGEDY doit sans doute bien davantage au Gun Club, ainsi qu’aux non moins regrettés Chris Whitley et 16 Horsepower, qu’au southern-rock classique, comme en attestent les deux titres bonus inclus, datant de sessions de 2011. Un blues-rock poisseux et hanté… On en redemande!
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Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
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