Rock |
Il y a (au moins) deux lectures possibles pour ce DVD/Blu-ray, issu (comme son titre l’indique) des archives personnelles des Stones. La première consiste à observer que les deux séismes quasi-simultanés de la fin des seventies (le punk et le disco) n’avaient alors de toute évidence pas épargné les Rolling Stones, soudain ébranlés dans leur hégémonie. Cela se traduit non seulement par l’urgence qui caractérise cette antépénultième prestation de leur tournée 1981 des États-Unis, mais aussi dans les accoutrements respectifs des protagonistes. Si Ron Wood semble s’être achalandé auprès du fripier des Lords Of The New Church, Keith s’affiche quant à lui en clône de ses propres disciples, Johnny Thunders et le Mick Jones du Clash: fini les pattes d’eph, tout le monde en slim! Quant à Jagger, il traverse la première moitié de ce set sapé en Aldo Maccione (veste mauve aux épaules rembourrées et falzar trop large, façon pyjama), avant d’opter pour un haut de quaterback et des collants de petit rat, le tout rehaussé de genouillères du plus bel effet… Charlie arbore pour sa part un élégant sans manches emprunté aux bronzés de Michel Blanc, tandis que ce bon vieux Bill semble en tenue de week-end au car-wash du coin… Il peut sembler futile de s’attarder ainsi sur la dimension chiffons de l’affaire, mais chacun sait que chez les Stones, le marketing n’est jamais anodin. Et comme disait un spécialiste en la matière, la mode, c’est ce qui se démode, pas vrai? Heureusement, sur le plan strictement musical, la cure de jouvence a du bon: si le faciès de Keith Richards amorce déjà le rictus de babouin qui le caractérise désormais pour l’éternité, le quintette de Richmond déroule ses 2h30 de show sans temps mort ni cellulite superflus: en 25 titres, le “Let’s Spend The Night Together” qui documentait jusqu’alors officiellement cette tournée (celle de “Still Life”) se trouve donc amplement surclassé. On peut certes argutier que Bobby Keys (dont c’était l’anniversaire, ainsi que celui de Keith) aurait suffi à suppléer ce pauvre Ernie Watts (saxophoniste émérite, de Cannonball Adderley à Frank Zappa en passant par Marvin Gaye et John Mayall), tandis que le fidèle Ian Stewart n’avait probablement pas besoin de se faire doubler par Ian McLagan, il n’en demeure pas moins que les Stones n’étaient alors pas encore devenus leur propre tribute-band. O tempora, O mores…
Paris-Move