Pop

Du Gainsbourg circa 66-75 à Polnareff et Gérard Manset, la pop française entretint une persistante relation intime avec son homologue (et modèle) anglaise. De Nino Ferrer (“Erotique”) à Antoine (“Qu’on Aime Taire”, “Dans Les Vagues Sous Ma Peau”), THE REBELS OF TIJUANA (qui résident de fait plus près du Rhône et de la Saône que du Rio Grande) naviguent certes dans des eaux délicieusement rétro, mais avec la salutaire (et néanmoins respectueuse) distanciation qu’ils partagent avec leurs contemporains des Liminanas. Quand ils empruntent furtivement les rythmes bossa dont les Doors firent leur miel à leurs débuts (“Et Le Blizzard S’estompe”, “Cavalcade”), on croirait ainsi ouïr un jeune Pierre Vassiliu jammant avec le King Set de l’alors non moins jeune Michel Jonasz… Excellant par ailleurs dans l’instrumental de Library Music façon Jack Arel (ils commirent nombre de soundtracks pour séries télé et publicités, comme en témoigne ici l’intermède “Biche”), ils entendent avec ce quatrième album déployer une palette débordant la niche yéyé-garage de ses prédécesseurs. Piano électrique, saxo et pedal steel (“Lydie S.”) côtoient donc ici les guitares psychédéliques (“Ne T’en Va Pas Maintenant”, “Massage”). S’ils adaptent avec goût “This Strange Effect” des Kinks et “Quand J’Étais Chanteur” de Michel Delpech, ces garçons ne versent cependant pas dans la pochade, et leur savoir-faire impressionne vraiment. Tandis qu’Albion célèbre Aznavour, Brel, Gainsbourg et Françoise Hardy, THE REBELS OF TIJUANA délivrent donc un bijou de pop franco-britannique, à la veille d’un Brexit qui ne pourra jamais effacer un demi-siècle de fascination réciproque. Une révélation.

Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

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