THE PAUL DESLAURIERS BAND – Bounce

Redeye / Vizztone
Blues-Rock

Paul Deslauriers n’est pas un nouveau venu, loin s’en faut, puisqu’il débuta voici déjà un quart de siècle en son Canada natal à la tête des Black Cat Bones. Et dès “It’s All On You”, bon sang, mais c’est bien sûr, ce bougre a du biberonner du Rory Gallagher, du Johnny Winter et du Sleepy John Estes à tous les repas! Sur un rockabilly beat déchaîné, “Take Me To The Brink” nous ramène à ces temps immémoriaux où Ten Years After boutait le feu partout où il passait. La comparaison ne se borne pas à la vitesse d’exécution, mais surtout à cette frénésie qui s’empare soudain d’un trio soudé comme le poing, pour produire le genre de sauvagerie communicative dont témoignent les frelons quand on les excite. Cette similitude se prolonge sur “Happy Waisting Time With You” et “Feeling All Kinds Of Good”, qui rappellent la manière dont ce brave Alvin revitalisait le rock des pionniers au détour de brûlots tels que “Rock n’ Roll Music To The World” et autres “Choo Choo Mama”. Autre point commun avec le Rory de “Blueprint” et “Calling Card”, cette propension à tricoter des cocottes empruntées au funk pour en instiller la trépidation au rockin’ blues (“Driving Me Insane” se révèle irrésistible dans ce registre). Puis, comme dans les seventies, on calme brusquement le jeu, et c’est la seule cover de cette galette qui y échoit: le fameux “Jumping At Shadows” de Duster Bennett (dont le Fleetwood Mac de Peter Green fit en son temps ses choux gras). L’occasion pour Paul Deslauriers de démontrer qu’en dépit de sa carrure de bucheron et sa barbe de grizzly bien léché, un cœur sensible bat bel et bien sous sa carapace de jean et de cuir. Cette pause terminée, le band remet le turbo pleins gaz pour un “Working My Way Back Home” mené à un rythme tel que l’on soupçonne ces garçons d’avoir oublié quelque chose sur le fourneau en partant! Sous ses accents hendrixiens, “Picked A Bad Day” porte les signatures communes de Paul Deslauriers et du blues-rocker américain J.P. Soars. Les deux complices n’y résistent pas au plaisir de croiser le manche, pour une joute qui se révèle sans merci. Ceux qui s’imagineraient encore n’avoir affaire qu’à une bande de blues-rockers incultes et obtus se réfèreront en priorité au country-blues “When The Darkness Comes”, dont on jurerait qu’il s’agit d’un original de Muddy Waters, tel que revisité par son plus grand fan, Johnny ‘Guitar’ Winter. Comme son titre le suggère, “Loosy Goosy Jam #769” est un instrumental saisi sur le vif en studio, où Paul échafaude riff sur riff en un impressionnant crescendo, tandis que sous son tir de barrage, la section rythmique ne lui concède aucune faveur. Cette bouillante galette se referme toutefois en finesse sur le lent “Waiting On You”, où, avec le renfort du Hammond de Lance Anderson, Paul démontre toute la dévotion qu’il porte à de grands aînés tels que Peter Green et Danny Kirwan. On n’était sans doute pas si mal lotis, au mitan des seventies, pour que certains artistes de la trempe de ce Paul Deslauriers se complaisent ainsi à nous y renvoyer avec pareil panache. Allez, replay!

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, August 30th 2019