THE INMATES – On The Road With…

Cat Records
Pub Rock
THE INMATES

Dès les sixties auxquels ils ne cessaient de se référer, leurs modèles les avaient pourtant prévenus: “Who wants yesterday’s papers?“. Ces derniers avaient même enfoncé le clou la décennie suivante, avec “Time Waits For No One”. C’est qu’à l’aube de ces foutues nineties, où ce que l’on tentait de nous faire passer pour du rock ressemblait surtout au Salon de l’électro-ménager (rayon sèche-cheveux et batteur à œufs), tandis que des boursouflures telles que Dépèche Mode, U2 ou un Pink Floyd désormais en phase avec son public de CSP+ bourraient les stades de beaufs croyant se dévergonder à bon compte (avant de reprendre dès le lendemain leur turbin d’abrutis), un quarteron de snipers résistait encore et toujours à l’envahisseur. C’est qu’il leur en fallait, de la ferveur et de la foi sous ces vents contraires. Pour mémoire, dans les funestes années 80, même Moon Martin, Willy DeVille et Dr. Feelgood (vous lisez bien) consentirent à plier sous le joug des synthétiseurs. Soit quasiment le retour de l’Occupation et de la marche au pas de l’oie. Face à cette honteuse collaboration, qui pour incarner la résistance? Des junkies (le Gun Club, de toute façon trop déglingués pour s’intégrer), des dandies (les Dogs, les Fleshtones) et ces ultimes avatars du pub-rock que représentaient les Inmates. Personne d’autre pour défendre le Fort. Je lisais récemment le commentaire d’un brave client d’Amazon qui ne trouvait qu’un seul défaut à “The Heat Of The Night’ (jusqu’à présent unique live des Inmates AVEC Bill Hurley): il le trouvait trop court. Cet honnête homme avait raison, we desperately needed some more. Sept ans auparavant, les Inmates (qui y avaient leur rond de serviette) étaient déjà passés au Plan de Ris-Orangis (rue Rory Gallagher), lors de la tournée promotionnelle de leur dernier album en date (sur Last Call, label du désormais sanctifié Patrick Mathé). Et il est vrai que cet enregistrement est un peu “Inside Out, Live”. Il n’en rend pas moins justice au grand Hurley, en réhabilitant le “Unchain My Heart” de Brother Ray que ses comparses avaient exécuté en son absence avec Barrie Masters sur “True Live Stories”. Citant malicieusement le riff de “Messin’ With The Kid” sur le “You Got The Look I Like” de Nick Lowe, ils expédiaient le “Lovin’ Up A Storm” de cet autre psychopathe de Jerry Lee Lewis. En état de grâce, le band pouvait alors évoquer les ultimes fantasmes des rockers de cuir et de satin, depuis les “Jeanie Jeanie Jeanie” et “Nervous Breakdown” d’Eddie Cochran jusqu’à la rencontre improbable de Bob Seger et Joe Ely (“Come Back Babe”, “Hey Landlord”). Rien que pour sa version saignante et définitive du “Dirty Water” des Standells, ce live est un indiscutable must. Acérés comme une lame, les Inmates ne faisaient pas de quartier, et si la balance tire effectivement un brin vers les aigus (ce qui ne gènera que les sourdingues en puissance), ce bonus inespéré n’en tombe pas moins comme une bénédiction. Les Inmates étaient certes “Out Of Time”, mais comment avons nous pu laisser sombrer pareil galion sans lui porter assistance? L’Homme est faible, et souvent chafouin aussi. Ainsi que l’énonce pourtant ici la version d’anthologie de leur “If Time Could Turn Backwards”: “I would walk in my footsteps, right back home to you”. Comme ces derniers samouraïs poursuivant un combat d’arrière-garde sur leur archipel oublié du Pacifique, ignorant l’armistice et le déshonneur, les Inmates tinrent le bunker jusqu’à leur dernière goutte de sueur. Combinant à ce point esthétisme et remue-ménage, on a rarement ouï document historique aussi tourneboulant.

Patrick DALLONGEVILLE
(Fan exigeant depuis 45 ans)
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, December 6th 2022

::::::::::::::::::::::::::::::

Album à commander ICI

“Dirty Water”, extrait du CD “On The Road with The INMaTES”:

“Tainted Love”, extrait du CD “On The Road with The INMaTES”: