Rock

Capable d’aborder tour à tour (et avec le même talent) le vaudeville acerbe et bastringue du satiriste majeur que demeure Randy Newman, Pink Floyd circa “Wish You Were Here” et le “Berlin” de Lou Reed (et parfois même au fil du même morceau, comme en témoigne avec brio “The Feelers”), The Hold Steady confirme avec son huitième album que sa versatilité ne connaît de nos jours guère d’équivalent que celle de The National. “Lanyards”, “Family Farm” et “Me And Magdalena” évoquent ainsi le lyrisme grandiloquent du Springsteen de “The River” et “Born To Run”, tandis que l’on ne trouve trace de la facétie de “Unpleasent Breakfast”, “Heavy Convenant”, “Hanover Camera” et “Parade Days” que chez le Steely Dan des débuts (ou encore XTC circa “English Settlement”). Cultivant sa stature de frontman au charisme le plus improbable du moment (croisement du Bun E. Carlos de Cheap Trick et d’un aide-comptable en pleine mid-life crisis), leur leader Craig Finn témoigne d’une verve plus acérée que jamais pour dépeindre les travers, doutes et angoisses de ses contemporains. Ce sextette de Brooklyn s’affirme donc en mesure de réhabiliter le terme ringardisé d’AOR (Adult Oriented Rock), démontrant si besoin était que le genre ne se limite (heureusement) pas à Shanya Twain et Sheryl Crow. Un album jubilatoire de bout en bout: et si l’intelligence et la culture n’étaient en définitive pas l’apanage des seuls intellos?

Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, January 6th 2021

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