| Blues |
Duo de Vancouver, The Harpoonist & The Axe Murderer consiste en l’harmoniciste Shawn Hall et le guitariste-batteur-one-man-band-all-by-himself Matthew Rogers. À eux deux, ces flibustiers constituent l’un des live acts les plus iconoclastes et incendiaires de la scène blues canadienne. Depuis leur premier album en 2012 (“Checkered Past”), ils ont pratiquement écumé tout ce que le pays du caribou et du sirop d’érable compte de rades à bière. En 2019 (soit quelques semaines avant le COVID), ils établirent pour trois soirs consécutifs leur bivouac à Calgary, dans le fameux club local The King Eddy. Renforcés pour l’occasion par trois choristes et un organiste émérites, ils en profitèrent pour s’y assurer les services du studio mobile des Rolling Stones (celui-là même qui campait aux abords de la Villa Nellcote pour l’enregistrement d'”Exile On Main Street”, et que le National Music Center local a acquis pour son musée), et il en résulte ce live chaud bouillant. Capables d’associer un profond respect du patrimoine de leurs prédécesseurs à leur approche de garnements effrontés, ces voyous boutent littéralement le feu à tout ce qu’ils touchent. Le “Cry A Little” d’ouverture doit ainsi beaucoup au “Rollin’ & Tumblin'” que charriait jadis Muddy Waters, tandis que “Do Watcha” emprunte au “Smokestack Lightning” de Howlin’ Wolf (en y intégrant un furieux solo de Hammond B3 signé Geoff Hilhorst), et que le single “Pretty Please” trouve moyen de mixer une magistrale partie d’harmonica à la Sonny Terry à un Diddley-beat de la mort, et des refrains d’une frénésie proche de celle du jeune Jerry Lee Lewis ! Leur hymne et manifeste, “Roll With The Punches”, bénéficie ici tour à tour d’un traitement sans attendrisseur et d’un gospel frénétique, pendant que la valse soul-blues “Hard On Things” prend les accents de “I Put A Spell On You” circa Creedence Clearwater Revival, et que le débridé “Love Me ‘Fore Ya Leave Me” associe gospel choirs et rockabilly groove. Shawn Hall s’y révèle l’un des plus brillants espoirs de l’harmonica blues pour ce millénaire naissant, et dans le rôle d’un Brownie McGhee branché sur le secteur, Matt Rogers ne démérite pas davantage. L’orgue de l’invité Geoff Hilhorst arrondit l’aridité originelle du duo, à laquelle le trio choral apporte un souffle indéniable (“Mama’s In The Backseat”, “Father’s Son”). La ferveur du public est communicative : quand un combo entre ainsi en combustion spontanée sur les planches, the joint is definitely rocking… Et quand un album live vous transporte ainsi au cœur de sa conception, c’est forcément un classique (et ce n’est pas son émouvant bonus track qui le démentira).
Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
PARIS-MOVE, May 28th 2022
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Album à commander sur leur Bandcamp, ICI
The Harpoonist & The Axe Murderer – Pretty Please (Live at the King Eddy):