The Golden Gate Quartet – Incredible

Dixiefrog / Harmonia Mundi
World Music

Les années, tout comme les décennies, ne semblent avoir aucune prise sur ce Quartet en or dont chaque album est non seulement apprécié, mais attendu. Comme si chaque décennie passée ne faisait que nous rapprocher plus encore de ces quatre voix magiques qui forment ce quartet à la chaleur humaine incomparable.
S’il a depuis près de huit décennies contribué à faire entrer la musique noire dans la légende, le Golden Gate Quartet n’en reste pas moins une formation d’actualité. Près de 80 ans après avoir surgi du sud des States et de sa ségrégation raciale, le quatuor aux voix d’or impose une nouvelle fois le respect avec ce ‘Incredible’ à vous coller des frissons. Un opus qui porte la marque, la patte du vieux tigre Clyde Riddick (82 ans) qui signe pas moins de dix des quatorze titres. Un tigre à la voix de ténor entré au sein du groupe en 1954 et rejoint aujourd’hui par Frank Davis (premier ténor), Paul Brembly (baryton) et Anthony Gordon (basse). Une manière de préparer à son tour ce passage du flambeau, pour que jamais ne s’éteigne la voix du Golden Gate Quartet. Un Quartet qui n’a de cesse de chanter ses racines, pour que jamais ne s’estompe ou ne s’efface de la mémoire collective tout ces pans de l’histoire des Etats-Unis d’Amérique.

Née de l’imagination d’un coiffeur de Berkeley, en Virginie, la formation signait dès ses débuts sa différence par rapport aux groupes vocaux noirs de l’époque, révolutionnant l’histoire des spirituals en y associant un groove et un swing hérités du jazz. Inspiré par les chanteurs afro-américains les plus populaires du moment, les Mills Brothers, le Golden Gate Quartet ajouta à son répertoire des compos laïques, faisant également rentrer dans son vocabulaire des instruments chantés, une technique vocale de virtuose permettant d’imiter avec réalisme trompettes, saxophones et autres instruments à vent.
Pour avoir séduit la Première Dame, Eleanor Roosevelt, lors de l’un de ses passages à New-York, le Quartet fut invité à la Maison Blanche et entra dans l’histoire en ouvrant les portes du Constitution Hall aux artistes afro-américains à l’occasion des cérémonies qui accompagnèrent l’investiture du Président Roosevelt. Deux ans plus tard, le Golden Gate Quartet devint le premier quartet noir à enregistrer des V-Discs, ces enregistrements produits à la demande du gouvernement américain pour les GI’s partis se battre en Europe comme dans le Pacifique.

Gorgé de soul et de gospel, essentiellement écrit et composé par Clyde Wright lui-même, ce nouvel album du Golden Gate Quartet, marque le début du nouveau millénaire du quartet. Complété par deux titres signés Paul Bremly (baryton) et deux titres appartenant au répertoire traditionnel, ‘Incredible’ démontre qu’il est non seulement un très bel album, mais une leçon de vie, et de respect mutuel.

Frankie Bluesy Pfeiffer
Paris-Move, Blues magazine (Fr), Blues Matters (UK)

Note importante: En plus des quatorze titres disponibles sur le CD, le label français Dixiefrog vous propose un livret impressionnant et un digipack grand luxe, mais aussi (et surtout) des bonus vidéo.

 

Ce ne sont certes plus les quatre étudiants du Collège Booker T.Washington, en Virginie, qui fondèrent le Golden Gate Jubilee, en 1934, mais l’esprit et les valeurs partagées subsistent. Ici, on retrouve les descendants légitimes de ceux qui devinrent le Golden Gate Quartet, quelques années plus tard, bien avant la construction du fameux pont de San Francisco et quelques années après leurs homologues du Golden Gate Quartet de Baltimore (Maryland). Plus de soixante ans après leurs pairs, de fervents artistes tiennent toujours le flambeau et poursuivent leur mission qui consiste, puisqu’ils l’ont acceptée, à distribuer et à distiller les plus belles mélodies gospel de par le monde!
La France, en particulier, a eu le temps, au fil des ans, de tisser des liens particuliers avec le Quartet. Et peu importe, vous dis-je, si les musiciens ont changé, entre temps. C’est ce Quartet qui a fait les premières parties de Jacques Brel, en 1963/64, celles de Gilbert Bécaud en 1965, et même celles de Jean Ferrat. Le concert qu’ils ont donné dans l’enceinte de la Basilique de Lourdes reste même gravé dans la mémoire des plus anciens. C’est dire si l’événement fut de taille et si cela mérite que l’on salue comme il se doit la publication d’un nouvel album de ces icônes qui appartiennent au ‘patrimoine musical de l’humanité’.
Qu’une formation qui a fait salle comble aussi bien au Casino de Paris que Salle Pleyel à la fin du siècle dernier s’offre un petit ‘come back’ ne peut qu’attirer notre attention. Et il faut dire que la galette vaut largement le détour!
Frank Davis est le premier ténor, Clyde Wright le second ténor, Paul Bremly le baryton et Anthony Gordon la basse. Ils ont repris le flambeau en 1954 et n’ont jamais cessé de prêcher la bonne musique, accompagnés ici par un orchestre composé d’un bassiste, d’un guitariste, d’un batteur, d’un pianiste-claviériste, d’un trompettiste, d’un trombone et d’un percussionniste qui joue également du vibraphone. De quoi illuminer toutes les chansons interprétées par le Quartet.
A signaler: cet album est une initiative française qui renvoie, en quelque sorte, l’ascenseur à une formation qui a toujours donné le meilleur d’elle-même, au public français.
Une superbe pochette, comme toujours chez Dixiefrog, et un livret dans lequel, une fois de plus, Sebastian Danchin nous fait un court récit, très pédagogique, sur le parcours de la formation à travers les décennies. Le CV de chacun des membres est actualisé, comme on dit dans les milieux avertis, et en plus des paroles des chansons de ce nouvel opus, l’annonce de la publication de la saga du Golden Gate Quartet (*) ravira les plus fervents admirateurs du groupe. Un must qui se doit de figurer dans toutes les discothèques des plus honnêtes gens.

Dominique Boulay
Paris-Move & Blues Magazine

(*) ‘Oh Happy Days, la saga du Golden Date Quartet’, de Clyde Wright et Philippe Legrand, chez Flammarion

The Golden Gate Quartet