THE COMO MAMAS – Move Upstairs

Daptone / Differ-Ant
Gospel

Il en va du gospel comme de tout autre item culturel, qu’il s’agisse du far-west, des pandas ou des orang-outangs. A savoir : quel que soit le label d’authenticité qu’on pourra lui décerner, il ne sera jamais aussi RÉEL que dans son milieu d’origine. Quelle que fût l’émotion de ceux de nos aïeux qui eurent la chance d’assister à la tournée européenne de la Buffalo Bill’s Wild West Revue, plus personne n’imagine de nos jours que Sitting Bull ait pu y paraître davantage hors contexte. De même, un grand singe ou quelque ursidé mâchonnant tristement une pousse de bambou dans la fosse d’un zoo n’exprimera jamais autre chose que le drame de son arrachement à son élément naturel. C’est pourquoi le Golden Gate Quartet et toute son engeance de par les scènes du monde n’approcheront jamais, quel que fût leur professionnalisme, l’intensité de l’expérience sensorielle à laquelle est confronté n’importe quel quidam dans la moindre chapelle du fin fond du Mississippi. Comme les gens de la Music Maker Relief Foundation et ceux de Daptone l’ont bien compris, le gospel est difficilement transportable. C’est pourquoi ces derniers se sont tout d’abord rendus à Como, dans le Mississippi, pour y capter dans leur jus ces trois big mamas, THE COMO MAMAS, et enregistrer leurs débuts discographiques a-capella, “as God planned it”. Ce n’est donc qu’après deux albums captés à domicile que Thomas Brenneck et Bosco Mann, les patrons de la maison Daptone, osèrent proposer à ces mamies de leur offrir un accompagnement instrumental à leur mesure. Pari risqué, mais totalement réussi, car sans dénaturer le moins du monde leur propos, l’écrin que procure le Glorifiers Band (outre Brenneck et Mann à la guitare et à la basse, l’orgue de Jimmy Hill et la batterie de Howard Steinweiss) s’avère aussi roots et respectueux que le genre l’exige. À l’arrivée, un grand disque, que l’on soit croyant ou non. Le grand truc du gospel (comme de la soul), demeurant l’appel aux tripes avant la raison : touché, coulé !
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Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
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