Afro Soul

Au même titre qu’Antibalas et le Menahan Street Band, le Budos Band (dont voici le sixième effort en quinze ans) figure parmi les house-bands émérites de Daptone Records. On en retrouve la trace significative sur les enregistrements des regrettés Sharon Jones et Charles Bradley, ainsi que ceux de Lee Fields, Naomi Shelton & The Gospel Queens, sans oublier bien sûr Amy Winehouse. La plupart des ingrédients fondamentaux du son Daptone sont ainsi présents, à commencer par une prise de son 100% organique. Bien entendu, la reverb vintage qui nimbe le tout ne doit rien à un quelconque bricolage numérique de post-production, et n’a été maîtrisée que depuis l’une de ces consoles antédiluviennes dont les studios du label préservent jalousement la pérennité des secrets. De même, le son pète-sec délicieusement suranné de cette caisse claire piccolo (le même que sur le fameux “Get Ready” de Rare Earth), le souffle immanent du trio de cuivres (dont les riffs perpétuent that early-seventies feeling), et la rythmique aussi groovy qu’implacable qu’impluse le quarteron guitare (Thomas Brenneck), basse (Daniel Foder), orgue (Mike Deller) et percussions (Rob Lombardo, aux congas et bongos) estampillent indéniablement cette rondelle du sceau caractéristique de la maison. Dépositaire autant que curateur de la bande originale d’une époque où ce type de musique accompagnait couramment des nanars signés Roger Corman, Bruno Mattei ou Dario Argento (touche pseudo-psychédélique cheap en arôme additif inclus, cf. ici “Sixth Hammer”, “Snake Hawk”, “Haunted Sea” ou le terminal “Renegade”), le Budos Band n’en revendique pour autant nulle désuétude. En effet, que l’on ne s’y trompe pas: si ces onze originaux revêtiront pour nombre de connaisseurs la saveur d’une madeleine de Proust, la performance de l’entreprise consiste bel et bien à conjuguer cette niche au présent, ainsi que le revendique avec ferveur le titre de cet album.

Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, September 14th 2020