The Bloodhounds – Let Loose!

Alive / Differ-ant
Rock

La première fois que j’ai écouté Dylan, je m’en souviens comme si c’était hier. J’avais dégoté aux puces une édition française originale de “Bringin’ It All Back Home”, avec traduction des lyrics sur la pochette intérieure. Et tandis que je m’attendais naïvement à une version US d’Hugues Aufray, je me pris violemment “Maggie’s Farm” au travers de la tronche. Heureusement qu’à l’époque je me trouvais en cours intensif de rattrapage Yardbirds et Pretty Things, car sans ça, j’ignore si je pourrais vous en parler aujourd’hui. Le genre de glissement de terrain dont on est alors à peu près certain qu’il ne peut se produire qu’une seule fois dans l’existence. Eh bien, pas de bol: sous des dehors affables, genre “The Strypes meet Question Mark”, ces salopiots de Bloodhounds viennent nous faire le coup du retour du fils de la revanche. Oh, pas de quoi hurler au génie, non,… c’est presque pire: ces morveux, aussi latinos que ? & The Mysterians et Los Lobos réunis, se permettent (avec la même morgue que les Chesterfield Kings et les Plimsouls avant eux) de se réapproprier un héritage sixties dont leurs propres parents n’ont sans doute jamais effleuré l’impact originel. Et le plus fort, c’est que ça marche à fond les turbines: leurs reprises du “Crackin’ Up” de Bo Diddley et du “Security” d’Otis Redding (ainsi que leur adaptation translucide du “Wang Dang Doodle” de Howlin’ Wolf – intitulée “The Wolf”!) enterrent autant les early-Stones que le Blues Project.
Bon Dieu, et si la prédiction d’Yves Adrien voici quarante ans (“Je chante le rock électrique”) avait du vrai? Ce truc, qu’on appelait alors rhythm’n’blues, serait donc capable de se réincarner de génération en génération? Vite, un exorciste! Euh…, pas trop vite, tout compte fait: c’est trop bon!

Patrick Dallongeville
Paris-Move / Blues Magazine / Illico / BluesBoarder
The Bloodhounds