TEXAS GENTLEMEN – Floor It!!!

Habsbro
Rock
TEXAS GENTLEMEN - Floor It !!!

Avec pareil blase, Texas Gentlemen, on s’attendrait légitimement à un album country, et on est surpris d’entendre la seconde livraison de cette nouvelle formation s’ouvrir sur les flons-flons d’une fanfare désarticulée, avant de bifurquer sur un funk instrumental cuivré typiquement seventies, pour déboucher sur les premières plages chantées. Les chœurs splendidement maîtrisés et la construction sophistiquée du confessionnel “Ain’t Nothing New”, ainsi que ceux de “Train To Avesta” et “Last Call” (ces arrangements mêlant cordes et cuivres, ces soli de slide gouleyante et ce piano alerte) évoquent autant Badfinger et Big Star que les premiers efforts de Ten CC et Steely Dan. Ce quintette de Dallas n’exprime de toute évidence nulle volonté de se conformer au moindre poncif, qu’il fût culturel, géographique ou temporel. Leur légende prétend que ces cinq jeunes gens ne se seraient inopinément réunis que pour remplacer au débotté le groupe déficient d’un petit club local, avant de se piquer au jeu pour asseoir en moins de trois ans leur réputation de “meilleur backing-band en ville”. Leur premier album offrait déjà les gages d’une ébouriffante versatilité, entre les Doobie Brothers, Stax et leur cover du bon vieux “Shakin’ All Over” de Johnny Kidd. Poussant le bouchon quelques lignes plus avant, des instrumentaux tels que “She Won’t”, mêlant allègrement funk louisianais et riffs modern-jazz, renvoient aux expérimentations d’un Lowell George, quand fraîchement émoulu des Mothers de Frank Zappa, il s’ébrouait tel un grizzly tout juste affranchi au sein de Little Feat. Pour achever de brouiller les pistes, l’ordonnancement des titres qu’annonce le digipack ne s’avère pas exactement celui qui prévaut sur la rondelle, comme en témoigne la position de la valse lennonienne “Sing Me To Sleep”. Classic Rock Magazine les décrit comme un croisement de Booker T. & The MGs et du Band, tandis que Vice/Nosey les situe entre les Beatles et Leon Russell. Aussi difficile à étiqueter qu’immédiatement séduisant, un album hors du temps, qui ravira autant les aficionados de “Countdown To Ecstasy” (le terrassant “Charlie’s House”, le délicieux “Skyway Streetcar”) que ceux de “Dixie Chicken” (la plage titulaire), qui y reconnaîtront aisément les leurs. Texas Gentlemen? Du grand art jubilatoire, sous un emballage potache digne en outre du regretté Neon Park: foncez!

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, July 23rd 2020