SUR LA ROUTE DE CLINT EASTWOOD

Marc Godin // Éditions du Layeur - See Magazine
Livre
SUR LA ROUTE DE CLINT EASTWOOD

Alors que paraît sur les écrans (désormais grands et petits, via HBO Max) son 39ème long-métrage en tant que réalisateur (sur une filmographie qui en dénombre près d’une soixantaine), saura-t-on jamais qui se cache derrière cette icône de 90 ans, dont le nom véhicula près de six décennies durant les plus extrêmes oxymores? Régulièrement associé à la réaction droitière la plus radicale (et soutien indéfectible de Reagan, Bush et Trump), ce Républicain convaincu n’acquit-il pas les rudiments de son métier au compagnonnage de Don Siegel, lui même fervent Démocrate? Et cet archétype du mythe américain ne doit-il pas les prémisses de sa longue carrière à un sous-produit européen que l’on désigna (avec une condescendance d’abord teintée de mépris) sous le terme valise de “western-spaghetti”? Partageant avec notre Alain Delon national le goût des dialogues aussi punchy que minimaux (ainsi que la même aura de virilité mutique et suprémaciste), mais également responsable de joyaux à la sensibilité aussi délicate que “La Route De Madison”, “L’Échange”, “Million Dollar Baby” ou “Gran Torino”, le réputé monolithique Clint Eastwood semble n’avoir eu de cesse de mettre en abîme sa propre image, comme il sut tout aussi brillamment le faire des genres ultra-codifiés qu’il aborda (du western au polar, en passant par le film de guerre, celui d’action et les road movies musicaux). D’un classicisme assumé, ses réalisations s’inscrivent dans la tradition des grands réalisateurs hollywoodiens, tandis que son farouche souci d’indépendance paraît relever davantage de considérations  juridico-financières que de superfétatoires ambitions artistiques. Cinéphile érudit, Marc Godin possède manifestement son sujet sur le bout des ongles, et si l’on n’en apprend ici guère davantage sur l’homme Clint que ce qu’en dévoilent ses multiples biographies (autorisées ou non), l’analyse commentée (et la riche iconographie) que propose cet ouvrage ravira autant les fans de Blondin et de l’Inspecteur Harry que ceux des nettement plus introspectifs “Minuit Dans Le Jardin Du Bien Et Du Mal” et “Cry Macho”.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, December 3rd 2021

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