SHELBY LYNNE – Shelby Lynne

Everso Records / Thirty Tigers
Soul
SHELBY LYNNE - Shelby Lynne

Ne vous fiez pas à la pochette, ceci n’est pas le premier album consacré au COVID-19. Vedette country à 19 ans à peine (et déjà divorcée), Shelby Lynne et sa sœur cadette (la chanteuse Allison Moorer) vécurent une enfance traumatisante, sous la tyrannie domestique d’un père alcoolique et violent. Ce dernier finit par se suicider après avoir assassiné son épouse, laissant les deux adolescentes orphelines. De quoi alimenter un sévère pathos, dont leurs débuts mainstream ne traduisaient alors pas la profondeur réelle. La carrière de Shelby semble n’avoir été ensuite qu’un long combat pour l’indépendance artistique, qu’elle finit par remporter en créant son propre label. Après son émouvant hommage à la grande Dusty Springfield en 2008 (sous la houlette du producteur Phil Ramone), elle n’a livré que deux albums au cours de la décennie suivante (les révélateurs “Tears, Lies & Alibis” et “Revelation Road”, en 2010 et 2011), se dispersant entre divers projets collaboratifs et apparitions au cinéma (elle joue la mère de Johnny Cash dans le film “I Walk The Line”). C’est dire ce que cet album (quasiment son premier en dix ans) revêt d’enjeux à ses yeux. Quasiment enregistré live dans les mêmes studios Capitol que le “Just A Little Lovin'” consacré à Springfield, il fait l’objet d’un documentaire (encore inédit) de la réalisatrice Cynthia Mort (qui contribue à l’écriture de certains textes des chansons). Si le “Strange Things” d’ouverture semble quelque peu démarqué du “I’m Losing You” de Lennon, les terrassants soul numbers “I Got You”, “Off My Mind”, “Don’t Even Believe In Love” et “Lovefear” (juste accompagnés d’un clavier, d’une beat-box et de chœurs dignes des arrangements dont Jerry Wexler ceignait la grande Aretha), ainsi que le surrender song “Love Is Coming”, posent le climat dominant cet album intime et introspectif. Le déchirant “Here I Am”, qu’elle interprète seule au piano, s’élève ainsi au niveau confessionnel d’une Laura Nyro. Une très grande vocaliste confirme donc, outre sa bouleversante puissance émotionnelle (ici à son pinacle), son impressionnant talent d’écriture. Un remarquable enregistrement, aussi cafardeux qu’universellement touchant.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, April 4th 2020

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