SHAWN LEE – Rides Again

Légère Recordings
Americana
SHAWN LEE - Rides Again

Expert dans l’art du brouillage de pistes, ce type demeure une énigme. Né au Kansas fin 1963 (sous l’identité plus ou moins avérée de Shawn Lee Mahan), il réapparut 25 ans plus tard à Los Angeles, pour s’y lier d’amitié avec un certain Jeff Buckley. Que ce dernier eût sans doute mieux fait de fréquenter des maîtres-nageurs ne change rien à l’affaire, puisque c’est alors et depuis là que Shawn Lee entama sa carrière de compositeur. Compositeur davantage que songwriter puisque, relocalisé ensuite à Londres, il y multiplie depuis les identités fractales, ayant accouché en moins d’un quart de siècle d’une quarantaine d’albums, dont une petite moitié seulement sous son propre nom d’artiste. Le reste se répartit entre le Ping Pong Orchestra, l’Incredible Tabla Band, Lord Newborn & The Magic Skulls, The Superimposers, Soul Surfers et Young Gun Silver Fox. Si le tournis ne vous a pas encore gagné, mentionnons pour le plaisir quelques uns des labels où se disperse cette logorrhée: Ubiquity, Wall Of Sound, ESL, Ultra, Talkin’ Loud, Bush!, Park the Van et enfin (jusqu’à nouvel ordre), Légère Recordings, cette entité teutonne basée à Hambourg, et manifestement spécialisée en mavericks en tous genres. Multi-instrumentiste confirmé, Mr Lee chante et joue les parties de guitare, de basse, de claviers ainsi que de batterie, et si son registre s’étend d’ordinaire du trip-hop jusqu’à l’electronica, en passant par le funk, le jazz, la soul et les musiques de films (ainsi que de jeux vidéos), il semble jubiler cette fois encore de prendre son monde à contrepied, avec cet album de facture mid-seventies Americana… “J’étais inspiré par des gens comme Tony Joe White, J.J. Cale ou Glen Campbell, pour ne citer qu’eux. J’ai grandi entouré de musique country. Aussi, qu’une partie en soit entrée dans mon ADN musical fait sens. Je me suis remémoré mon enfance au Kansas, c’est très révélateur et personnel”, énonce-t-il en exergue de ces dix pépites. S’ouvrant sur la southern ballad autobiographique “Wichita” (son bled natal), cette martingale décline ensuite teenage laments avec harmonies vocales à la Beach Boys et reverb partout (“Whenever The Wind Blows”), trottinements country steel-guitarisés (“Crystal Springs”), desert-tunes équestres façon early-America (“Losing My Mind”, “Yesterday Tomorrow Today” et le languide instrumental “Joyland” qui ferme le ban), pastiche des Doobie Brothers (l’irrésistible samba country “Kansas City Summer”), touche Steely Dan ’74 assumée (“Farmer Brown” et “Mr Maestro”), voire ce Laurel Canyon country-rock que Poco et les Eagles mitonnaient jadis (le confondant “Brown Hair Woman”).
Avec sa sunshine coolitude, un LP de facture délicieusement rétro, à siroter sur la terrasse, un tequila sunrise à la main, tandis que les (petits) enfants restent calfeutrés à l’étage avec leurs consoles de jeux. Le fil du temps ne serait-il pas en définitive cette boucle sans fin que d’aucuns prétendent?

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, March 25th 2020

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SHAWN LEE – Rides Again: à retrouver sur Sounds of the Universe, ICI

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