Psych-Pop |
Tout d’abord, petit précis géographique: situé non loin de San Francisco, Oakland fut, au lendemain de l’attaque japonaise de Pearl Harbour, l’un des centres névralgiques de l’industrie de guerre américaine. Attirant une main d’œuvre conséquente depuis le Texas, l’Oklahoma ou l’Ouest de la Louisiane, ses chantiers navals ont engendré en paralléle une foisonnante scène musicale locale, empruntant majoritairement aux traditions vernaculaires de ces ouvriers migrants (country certes, mais surtout blues et rhythm n’ blues). Rien d’étonnant donc à ce qu’une formation locale actuelle telle que Shannon & The Clams y perpétue cet éclectisme de brassage dans son répertoire. Formé en 2007, ce quartette a su préserver un line-up stable au fil des ans, mais livre peut-être, avec son septième album à ce jour, son plus grand combat face à l’adversité. Car s’il n’existe guère de formations que la récente pandémie ait épargnées, Shannon Shaw vient d’affronter en outre une tragédie personnelle, avec la perte de son fiancé dans un accident de la route. Elle évoque ce deuil avec une sincérité désarmante sur plusieurs de ces 14 originaux, à commencer par le délicieusement kitsch “The Vow” et d’autres tels que “Oh So Close, Yet So Far”, “What You’re Missing”, “Real Or Magic” et “So Lucky”. Avec leur Spector spanish Harlem beat et leur orgue Farfisa, ces derniers rappellent les rengaines des Ronettes et Shangri-Las d’antan. D’autres plages se montrent réminiscentes du garagisme psychédélique dont la fameuse anthologie “Nuggets” de Lenny Kaye rendit compte à l’orée des seventies: “The Hourglass”, “Big Wheel” et la plage titulaire n’auraient ainsi pas déparé le répertoire des Electric Prunes ou du 13th Floor Elevator, non plus que le bien intitulé “Dali’s Clock” celui des Strawberry Alarm Clock. “UFO” se situe à mi-chemin des Seeds et de ? & The Mysterians, et avec son solo de slide sur un beat à la “You Can’t Hurry Love”, “Bean Fields” sonne comme The Great Society pastichant les Supremes, tandis que les déchirants “In The Grass”, “Life Is Unfair” et “Golden Brown” (sans rapport avec le hit éponyme des Stranglers) pourraient passer pour des inédits de la grande Bobbie Gentry. Le tout est produit par Dan Auerbach (l’homme des Black Keys présidant aux destinées de Robert Finley et Nath Myers), et que vous disposiez d’une solide culture sixties ou non, en évitant soigneusement les trappes rétro-nostalgia qui leur tendent les bras, Shannon & The Clams pourraient bien devenir votre groupe préféré du moment. C’est tout le mal que l’on vous souhaite.
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, May 4th 2024
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