RUSSELL DICKERSON – Southern Symphony

Triple Tigers
RUSSELL DICKERSON - Southern Symphony

Nouveau produit sur la scène ultra-manufacturée de l’industrie de l’entertainment fructifiant à Nashville (devenue en quelque sorte le pendant de Disney Inc. pour les radios néo-white-trash), Russell Dickerson semble méticuleusement calibré pour incarner le pendant right-wing de dissidents réformateurs tels que Jason Isbell et Lucinda Williams. Ne vous fiez pas à son look d’avatar de Robert Gordon, car ce brave gars (élevé au grain dans le même État, à Union City) personnifie l’essentiel des valeurs de la communauté à laquelle il s’adresse – et appartient. Avec son heavy beat façon “We Will Rock You” et son refrain choral taillé pour les stades, l’hymne “Never Get Old” s’avère un plaidoyer éhonté pour les idées les plus conservatrices de l’Amérikkke profonde (via la camaraderie entre voisins de la middle-class blanche, lors de barbecues résidentiels), tandis que “It’s About Time” célèbre la Bud-Light à moitié prix et que “Forever For A Little While” cite explicitement Texaco (le placement de produits débordant de nos jours la seule imagerie des clips). La plage titulaire résonne comme un manifeste proto-suprémaciste en puissance (“là d’où je viens, on se lave les mains avant de se mettre à table, on ne répond pas à sa mère et le prêtre te montre la voie…”): de quoi faire passer Lynyrd Skynyrd même pour de dangereux progressistes… Pour achever de vous mettre en garde, les odes maritales que représentent ici “Home Sweet”, “All Yours All Night”, “Honey”, “Waiting For You My Whole Life” et “Come To Jesus” (sic) prodiguent une idée plausible de ce que la tribu Trump doit écouter sur ses earphones, tandis que son patriarche déconfit rumine sa défaite contestée sur les golf greens (et jusqu’au Capitole). La production “up-to-date” de Dann Huff (ne répugnant pas à abuser de tapageuses drum-machines programmées en break-beats, ainsi que d’invasifs arrangements synthétiques) s’applique à appâter de même les trentenaires et les quadras, et le camp Républicain semble donc bien avoir trouvé son propre Bruce Springsteen, fusse-t-il de papier-mâché… Un slogan pour 2024: white-trash matters?

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, January 5th 2021