Rotfront – Visafree

Essay Recording
World Music

Voici une vraie belle découverte pour l’auditeur un peu sectaire que je dois être parfois! L’exercice qui consiste à écouter ce disque est même surprenant et passionnant à plus d’un titre car le néophyte que je suis va de découverte en découverte au fil des auditions ou des lectures des paroles des chansons. D’autant que je découvre là ce que j’appellerais une ‘fanfare festive’ au niveau musical, mais protestataire et militante au niveau des paroles! Car il vous faudra certes ‘écouter’, mais aussi bien vous imprégner des textes, car ceux-ci sont terriblement prenants. A l’instar du titre de cet opus, ‘Visafree’.
Les musiciens sont au nombre de huit: Yuriy Gurzhi au chant, à la guitare et à la basse, Simon Wahorn à la basse, à la guitare et au chant, Mad Milian et Dorka Gryllus au chant, Anke Lucks au trombone, Max Bakshish à la clarinette et au saxophone baryton, Dan Freeman au saxophone ténor et Jan Pfennig à la batterie. L’évocation du seul nom des musiciens suffit à vous faire comprendre, je pense, que l’on a là un projet musical qui dépasse, et de loin, les seules frontières nationales mesquines. Ce que l’on ne manquera pas de vérifier à l’écoute de l’intégralité de la galette. Deux invités sont également de la partie: Daniel Kahn à l’accordéon sur Csovaz, et Boris G au chant sur le quatorzième morceau, Sigaretta. Les deux titres en question surlignant davantage la portée internationale de l’ensemble.
Le tout a été enregistré à Berlin, aux studios Phlexton. Les textes sont chantés soit en anglais, soit en allemand ou dans différentes langues d’Europe centrale, bosniaque ou slovaque. Le tout est non seulement festif et joué sur un mode plutôt enthousiaste, si l’on peut dire, vu l’armada de cuivres, mais c’est en plus très militant! Regardez à nouveau le titre de la galette et vous comprendrez aisément leurs raisons de chanter. On pense tantôt aux Mothers of Inventions de Frank Zappa, tantôt au folklore d’Europe centrale, tantôt à beaucoup d’autres régions que l’on ne souhaite même pas localiser, pour conserver notre souhait de liberté, liberté totale et sans visa à présenter. C’est un peu ‘bienvenue dans l’auberge espagnole sonore’ et c’est super entraînant. Les titres s’enchaînent à un rythme trépidant et on se laisse prendre très facilement par l’ambiance générale. Les titres annoncent la couleur: ‘Visa Free’, ‘Gay’, ‘Gypsy and Jew’ ou…’James Bondski’…, car pour réussir une telle entreprise, il est évident que l’on doit posséder une bonne dose d’humour et de dérision.
Un disque qui s’impose par la qualité et la générosité du projet, et que tout fêtard qui se respecte se doit de posséder, histoire de teufer intelligent…!

Dominique Boulay
Paris-Move , Blues Magazine
Rotfront