ROMANO BIANCHI – Fringale

Le Pop Club Records
Psych-Pop
ROMANO BIANCHI - Fringale

Dès “L’Oubli Me Convient” (sur le même pattern que “I’m The Walrus”), on saisit l’angle: le GPS de la DeLorean bien calé sur 1967, le Suisse Romano Bianchi nous embarque séance tenante vers un certain âge d’or psychédélic pop, mais dans la langue de Molière s’il vous plait. Avec sa slide harrissonienne et son drumming délicat à la Aphrodite’s Child, “À l’ombre D’Une Idole” évoque les quelques expériences jadis concluantes en la matière au pays du camembert (depuis le “My Year Is A Day” des Irrésitibles jusqu’au Système Crapoutchik, pour le jubilatoire “Quittez Toutes Les Écoles d’Art”), tandis que le jerk beat alangui de “Sentiment D’Absence” s’adosse à des entrelacs de cordes nimbés d’un écho millésimé, et stipule que “la compagnie du temps est un échafaud”, avant son solo de Strato estampillé Mickey Finn. Faut-il ainsi déceler en “L’Obsolescence” une fine allusion au fameux “Obsolete” de Dashiell Hedayat, comme l’y incitent les dérapages incandescents de guitares acides? Entre hommage et pastiche (avec ses luxuriants arrangements de cuivres et de wah-wah), la remarquable plage titulaire évoque pour sa part ce que Dutronc et Polnareff réalisèrent de mieux en ce registre, et s’achève sur la sentence définitive: “Je n’y comprends rien, et d’ailleurs je m’en fous”, tandis que “Le Silence De Ma Ville” en fait autant sur le mode agreste, mêlant arpèges de banjo façon late sixties Kinks et solo de Telecaster, et que la bossa  aérienne “Une Année Sans Hiver” renvoie au Pierre Vassiliu post-soixante-huitard. Avec leurs chœurs ouvragés et leurs cordes boisées, les élégiaques “Crois Ces Yeux” et “Après De Ça” prolongent les références californiennes early-seventies des formations auxquelles participa Romano (Magic & Naked, La Cabane De Baldwin). Dans notre Hexagone à la même époque, cela s’incarnait chez Ilous & Decuyper, Présence ou encore Darras et Désumeur. Merci, Mr. Bianchi, de nous remémorer de si tendres souvenirs, avec votre érudition teintée d’une si noble et subtile ironie.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, January 23rd 2022

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