ROLLING STONES – Bridges To Bremen (DVD)

Eagle Vision
Rock

Couillus, tels les vieux briscards qu’ils demeurent pour l’éternité, Les Rolling Stones abattent d’entrée leur master-stroke en déboulant sur un “Satisfaction” d’anthologie. Genre “on en a plein d’autres sous le pied, mais au moins, votre rappel, vous pourrez pas pleurnicher que vous l’aurez pas eu”. Attifé d’une sorte de peignoir aux motifs félins, notre homme Keith (comme l’écrivait ce nabot de Manœuvre) arpente la scène un rictus simiesque au faciès et une paire de shades aux yeux, le bandana à son front censé masquer la progression d’une calvitie galopante. Et l’on réalise soudain que si John Lennon aurait certes pu être le seul Beatle à mériter d’être un Rolling Stone, ce bon vieux Keith est sans doute le seul Stone qui aurait pu figurer au line-up des Flamin’ Groovies. Bon, les faits, rien que les faits: on est le 2 septembre 1998, et “Bridges To Babylon” (leur dernier LP en date, paru l’année précédente) accomplit l’exploit non négligeable de s’inscrire parmi le cercle restreint de leurs cinq albums les plus dispensables. Peu leur chaud, puisque l’affaire est comme de coutume prétexte à une méga-ultra-tournée mondiale XXL, via laquelle les trois Stones originels encore à bord vont assurer les dividendes de leurs arrières-arrières-petits-enfants jusqu’au XXIIème siècle inclus. Pour bien enfoncer le clou, ils enchaînent illico avec un “Let’s Spend The Night Together” que l’on croyait révolu depuis la tournée “Still Life” de 1981, et le ton est donné. Tandis que le péquin moyen (allemand, en l’occurrence) ânonne à l’oreille de son voisin: “y avait pas un blond à l’origine, sur ce titre…?”, le conglomérat sur scène embraye “Flip The Switch” (qui ouvrait alors leur dernier CD dans les bacs à soldes). Celui-là, si vous en vouliez une trace live, c’est l’occase ou jamais, puisqu’ils ne l’ont pratiquement plus joué ensuite. Et c’est anachronisme à tous les étages: outre Blondie Chaplin (jamais vu prénom si peu pertinent) aux chœurs et miscellaneaous (son compadre Ricky Fataar fit tout de même partie des Rutles), Chuck Leavell (coupe crew-cut inepte) et Bernard Fowler (coiffé d’un bob façon “Camping 2”), seuls Darryl Jones (turbine propulsive suppléant un Bill Wyman cacochyme), Lisa Fischer (veuve noire éructante façon Addams Family) et le revenant Bobby Keys semblent raccord avec la pièce en vigueur. À preuve, incongruité s’il en est, Keith réussit ici la majorié des soli qu’il s’octroie (d’où son ricanement lupesque en conclusion de “Gimme Shelter”). Ce concert se poursuit en passant ainsi en permanence du coq (“Paint It Black”, “Honky Tonk Women”, “Brown Sugar”, “Start me Up”…) à l’âne (“Saint Of Me”, “Anybody Seen My Baby?”, “Out Of Control”, “Wanna Hold You”). Toute polémique bue, ce DVD ravive plus que jamais LA question existentielle du dernier demi-siècle écoulé: quel plaisir supérieur peut bien espérer l’Homme Moderne (avec ses vêtements sur lui, s’entend) qu’un concert de Ron Wood et ses Fabuleux Rolling Stones? Vous avez 155 minutes, je ramasse les copies à la fin.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, August 2nd 2019

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