Rihanna – Anti

Westbury Road/Roc Nation
World Music

Après sept immenses succès commerciaux en autant d’années, la reine de la Barbade et du consumérisme R&B casse le rythme. Et certains codes. Trois ans ont été nécessaires à la gestation d’Anti avec, dans l’intervalle, la mise en ligne de ‘FourFiveSeconds’ avec Paul McCartney et Kanye West, ‘American Oxygen’ et ‘Bitch Better Have My Money’, dont l’excellent clip obscèno-gore, starring Eric Roberts et Mads Mikkelsen, a enflammé la Toile…

Trois morceaux qu’on pensait être les piliers dudit album et qui brillent par leur absence, même de sa version Deluxe (gracieusement communiquée par Def Jam). Dernier épisode d’une opération marketing moins chaotique qu’elle n’y paraît: ‘Anti’ était téléchargeable gratuitement le jour de son lancement sur la plate-forme Tidal de Jay-Z, moyennant la communication de quelques infos personnelles. Renseignements pris sur Internet, faute de crédits dans le livret, c’est ‘Consideration’ qui lance les débats sibyllins entre Riri et SZA (prétexte féminin du label TDE, très à l’aise en voix de tête) sur un beat hip hop saturé. Belle surprise, suivie de près par le nu soul ‘James Joint’ aux synthés scintillants. Puis l’interprète au flow linéaire, parfois comme peu concernée, se laisse déborder par une prod’ urbaine trop invasive. Dire que ‘Work’, single pour club sans structure ni relief, a mobilisé pas moins de huit auteurs! Fort heureusement, sa mise en images explicite – avec aréoles semi apparentes – donne le change. Le rappeur canadien Drake, ex-toy boy, n’y fait que de la figuration. Il faut attendre ‘Same Ol’ Mistakes’ (Tame Impala) et ‘Love On The Brain’, respectivement pop indé psyché et soul rock d’inspiration sixties, pour que Rihanna se mette en danger. Jusqu’à se casser la voix dans les aigus et surjouer les divas blessées sur ‘Higher’, portée par les cordes semblant surgir d’un vieux gramophone. La star, en quête d’ailleurs, ne prend aucune direction particulière. Et surtout ne signe aucun tube. Poussera-t-elle l’audace jusqu’à congédier sa cour pour ne collaborer qu’avec de véritables artistes et retrouver sa crédibilité…? Réponse dans le prochain ‘Voici’.

Jean-Christophe Baugé
Metal Obs’ / Blues Magazine / Paris-Move

Rihanna