RAUL PAZ – Guajiro Chic

Coloma Production / Integral / Believe
Latino
RAUL PAZ - Guajiro Chic

Depuis que la salsa s’est mise à déferler sur notre hexagone souvent friand d’exotisme (cf. les calamiteuses zumba et lambada), nos compatriotes se sont souvent enflammés pour des ersatz plus ou moins crédibles en la matière. Se démarquant des ancêtres cacochymes du Buena Vista Social Club, le Colombien Yuri Buenaventura fut l’un des premiers à rafler la mise, après ses débuts parisiens à faire la manche dans le métro. Ce furent des considérations alimentaires similaires qui incitèrent d’abord le Cubain Raùl Paz (alors étudiant boursier à la Schola Cantorum de notre capitale) à se joindre à la diaspora latina locale pour animer les soirées caliente du Hot Brass et du New Morning. Rejeton d’une famille éduquée (père pharmacien et mère biologiste), le jeune Raùl ne cultivait pourtant pas jusqu’alors un grand attrait pour les musiques vernaculaires de son île socialiste. Tandis que ses parents faisaient la fête au son du guajira, il étudiait plutôt la musique classique occidentale au sein de l’autochtone Institut Supérieur Des Arts. Repéré à Paris par le producteur américain Ralph Mercado, il se vit proposer l’aubaine d’enregistrer son premier album à Miami, dans les studios de Gloria Estefan. Paru en 99, “Cuba Libre” (rebaptisé “Imaginate” pour le marché américain) s’écoula à 100.000 exemplaires. La presse new-yorkaise l’ayant consacré “révélation masculine de l’année“, il multiplia dès lors les concerts aux States. Deux ans plus tard, son label le libérait néanmoins de son contrat (suite à la disparition de ses deux artistes phares, Tito Puente et Celia Cruz). Interdit de retour à Cuba par le régime castriste (qui le considérait dès lors comme un dangereux transfuge), notre artiste déconfit s’en revint donc en sa patrie d’adoption (la nôtre). Bientôt signé chez Naïve, il y publia cinq LPs de 2003 à 2010, avant que la levée des restrictions (consécutive à la disparition du Lider Maximo) ne lui permette enfin de rentrer au bled. Après des années de tournées (ainsi que de course aux cachets et aux charts), Raùl résolut alors de se mettre au vert, et fit l’acquisition d’une propriété agricole au cœur des montagnes, d’où il cultive à ce jour encore son jardin, à la manière d’un Candide ou d’un Jean-Jacques Rousseau des Tropiques… C’est dire avec quelle impatience son come-back européen était attendu par ses fans! Prolongeant le retour aux sources engagé en 2010 par “Havanization”, il perpétue désormais la tradition locale (non sans l’agrémenter d’une certaine modernité, ne serait-ce que dans la prise de son et les arrangements). Des conjuntos tels que “La Mala” et “Otra Vez” voient ainsi leurs cuivres s’accommoder de claviers numériques et de percussions synthétiques, même si de tendres sérénades en boléro comme “Bailar” et “Cariño III” n’auraient pas déparé le répertoire de crooners historiques tels que Compay Secundo et Ibrahim Ferrer (ni, avec leur rythmique en très, les guapachas “Tranquilo” et “Te Sorprenderà”, celui du grand Eliades Ochoa). Et si Manu Chao n’aurait sans doute pas renié la cumbia du single “Asi No”, ce n’est certainement pas cet album qui vaudra à Raul Paz d’être déchu de son titre de Chevalier notre Ordre du Mérite.”Guajiro Chic” se traduit par “paysan chic“… Et si cet album, aussi fédérateur que consensuel, s’avérait pour Raùl ce qu'”Harvest” fut jadis à Neil Young? Il est vrai que nous approchons le temps des récoltes…

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, July 23rd 2025

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En concert le 20 novembre 2025 à l’Alhambra de Paris.

PS : Vous ne lui trouvez pas un air de famille avec notre José Garcia national, vous?