Livre

Bohemian Rhapsody, biopic révisionniste taillé pour notre société de l’émotion, avait-il fait montre d’une vraie maladresse ou généré une fausse polémique? La vérité est ailleurs, dans cette “Totale” de 528 pages consacrée aux 15 albums de Queen. L’auteur Benoit Clerc y est tellement factuel qu’on attend en vain que son verbe pétille, que sa plume se fasse vipérine. Portant, on retrouve bien nos émotions de jeunesse floutées: l’unanimisme médiatique autour du charisme de Farrokh “Freddie Mercury” Bulsara, excepté pour la presse anglaise apostate, adorant ce qu’elle a brûlé, brûlant ce qu’elle a adoré, et qui devrait se faire agonir d’injures. Si l’on se discipline pour ne pas commencer par les six pages dévolues au plus grand morceau de l’histoire du rock précité, on goûte à une œuvre précoce foisonnante, plutôt hard rock, qui a inspiré Metallica (“Stone Cold Crazy”, 1998), Def Leppard (“Dear Friends”, 2006) et Dream Theater (“Tenement Funster”, 2009) rien que pour l’album Sheer Heart Attack de 1974. Deux ans plus tard, Queen s’engage sur un nouveau terrain d’expérimentation: “Bohemian Rhapsody”, ballade/ opéra/ rock au texte insaisissable, requiert l’empilement de 180 prises en trois semaines. Ce sera le troisième single le plus vendu de tous les temps au Royaume-Uni. Enfin, plutôt que de délivrer un prêche sans nuance, Benoit Clerc prend les collaborations de Queen avec Paul Rodgers puis Adam Lambert pour ce qu’elles sont: un dernier galop, un dernier souffle héroïque… Sans le bassiste John Deacon, qui savait servir sans s’asservir.

Jean-Christophe Baugé
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PARIS-MOVE, November 9th 2020

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