Après un premier opus, ‘Tuscarora Nation Blues’, qui était un véritable cri du cœur pour que l’on écoute et que l’on respecte ces indiens Tuscarora dont elle est directement issue de par sa mère, Pura Fe’ nous avait proposé un second album plus intimiste, ‘Hold The Rain’, comme si après son premier cri, la chanteuse-guitariste avait eu besoin de se poser un instant, et voir comment son appel avait été entendu.

 

Le succès immédiat de ces deux albums ayant du conforter Pura Fe’ dans sa démarche, l’indienne au sang chaud nous revient avec un nouvel opus qui bouscule les limites d’un environnement musical purement blues et amérindien. Réunissant autour d’elles Danny Godinez à la guitare, Farko Dosumov à la basse, les Carolina Chocolate Drops ainsi que Sam Duffy, fondateur de la Music Maker Foundation et musicien averti, c’est avec des rappeurs indiens rencontrés lors de la réalisation du monumental triple album ‘Indian Rezervation Blues’ (Dixiefrog) que Pura Fe’ se propose de non seulement faire le lien entre les différentes cultures musicales mais aussi et surtout entre les générations et les peuples.

 

Pari osé, presque fou, car qui aurait pu imaginer un jour qu’une chanteuse indienne allait réunir sur un seul et même album le rap et le blues, le rock et les chants indiens?

Pari réussi, en tout cas, et superbement réussi, grâce aussi à ce mélange subtil de compositions personnelles et de reprises, dont une très belle adaptation de Joni Mitchell avec ‘Flight Tonight’ et cette superbe version de ‘Hard Time Killing Floor’ qui aurait sans nul doute fait frissonner Skip James.

 

Comme dans ses deux précédents opus, Pura Fe’ fait entendre sa voix et revendique l’influence de la musique amérindienne dans le blues. Dès le premier titre, ‘Red, Black on Blues’, vous êtes plongés dans ce son si particulier qui rend l’album magique: banjo, chants indiens, rap, tambour indien, et avec toujours cette voix lumineuse de Pura Fe’ qui survole le tout tel un aigle, ou un condor. Deux animaux à la symbolique très forte que Pura Fe’ vous chante un peu plus loin, dans ‘The Condor Meets The Eagle’.

 

Sur ‘Borders’, Pura Fe’ fait fusionner le blues et le rock pour donner à sa musique une force surhumaine, comme pour faire disparaître ces frontières, ces grillages qui entourent les réserves indiennes, avant de chanter avec douceur et tendresse dans ‘Women Sacred’ tout son attachement aux femmes qui luttent, qui jamais n’abdiquent, qui se relèvent fièrement, sans cesse.

 

D’autres titres vous feront dresser les poils, comme ce ‘Stand Up For Human Pride’, ou ce très beau ‘Angel’. Un ange passe, et vous appuyez sur ‘replay’. Un ange passe, et dans le ciel un condor croise un aigle.