Blues-Rock |

Tout comme le regretté Phil Chevron n’avait jamais travaillé chez Citroën (en dépit de son patronyme), Phil Vermont n’est pas de Montpelier (capitale de l’État américain homonyme, mais avec un seul “l”), mais de la Seine-Maritime. Ce qui ne le dispense en rien d’accointances avec le Nouveau-Monde, comme nous allons le démontrer. En plus de vingt ans, il s’est produit parmi maintes formations, dans des styles variés (rock, variété, blues, country, métal, jazz fusion, musique festive), et débuta au sein de la Familia, qui parcourut les routes d’Europe pendant plus de douze ans, où il officiait en tant que guitariste, choriste et co-compositeur. Passé lead-guitariste et chanteur au sein de Superscream, il en composa et produisit les deux premiers albums (qui suscitèrent de bonnes critiques en France et à l’étranger), avant de fonder un cover-band de Jimi Hendrix et Stevie Ray Vaughan (Tom Cactus & the Voodoo Rabbits, avec Clément Landais à la basse), tout en œuvrant en tant que chanteur dans le groupe country normand Texas Line. Vient ensuite Phil Vermont & The Electric Wizards (toujours avec Clément), qui évolueront en trio avec Jean-Michel Tallet aux drum-sticks. Ce dernier ayant longtemps servi au sein de Neal Black & The Healers, la connexion était tentante, et c’est donc cet expatrié dans nos contrées (et artiste Dixiefrog depuis trois décennies) qui co-produit à présent ce premier album “solo” de Phil. Avec guillemets, puisque s’il en assume effectivement les musiques de dix des treize titres, son complice Neal lui y prête la main pour les lyrics, et outre les fidèles Clément et Jean-Michel, un harmoniciste, un trompettiste et un claviériste viennent en étoffer le spectre sonore. Dès le “Last Man Alive” d’ouverture, on se trouve en présence d’un funk-blues des plus actuels, dans la ligne de Joe Bonamassa et Eric Gales. L’orgue de Boris Branilovic et les cuivres doublés de Josselin Sauvage (poussés par les coups de boutoir d’une section rythmique groovy et serrée comme un poing) y propulsent les choruses d’une guitare littéralement en fusion. “Sexy, Sexy, Sexy!” pousse le curseur funk plus loin encore, entre Prince et Sly & The Family Stone: difficle de ne pas taper ces mots sans se trémousser niaisement sur son fauteuil de bureau! Sans y céder la moindre once de virtuosité, le chorus de guitare s’y révèle totalement distinct de celui de la plage précédente, et on commence à cerner l’amplitude de la palette de Phil, d’autant qu’avec son riff abrasif, la plage titulaire investit le registre blues-rock de ZZ Top circa MTV, et que le solo de six cordes y grimpe à nouveau dans les cintres, avant de céder in fine le pas à un harmonica. “I’ll Be There” et “The Waders” sont le genre de ballades bluesy que popularisa Gary Moore au temps de sa splendeur commerciale. Neal Black prête la voix (et le manche) à trois plages (“Me & The Devil”, avec l’harmo de Laurent Gruau, “Who’s That Lady?” et “The Waders”), et Phil rend hommage à Peter Green en reprenant son instrumental “Tribal Dance”, auquel contribue avec bonheur l’orgue de Boris. Comme l’indiquent leurs titres, “Hard Love” et “Sad Story Of A Blind Man” sont de ces southern-rock tunes comme les affectionnaient des formations telles que Skynyrd dans les seventies (avec pumping horns et piano boogie à la Billy Powell pour la première), et “Working Man” une sorte de holler sudiste au beat lancinant (tambourin têtu inclus), tandis que “Lady Luck” s’avère un emprunt en slide et picking délicats au répertoire de Neal Black, mettant en valeur la sensibilité de Phil au chant. Voici donc l’album roboratif d’un authentique guitar-hero, qui ne s’est pourtant pas contenté d’un banal catalogue pyrotechnique (que dispense en phantom track un furieux instrumental funky dans la veine du “Blow By Blow” de feu Jeff Beck), pour s’appliquer plutôt à peaufiner écriture et arrangements dans une démarche d’équipe. Tu as raison, Phil, ton heure semble effectivement venue.
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, October 26th 2024
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