Paul Litteral – Litteral Truth (FR review)

Outrageous8 – Street Date, Available
Jazz Funk
Paul Litteral – Litteral Truth

Vous connaissez peut-être Paul Litteral sans même le savoir. Depuis plus de trente ans, sa trompette s’est glissée comme une ombre sur les grandes scènes de la musique populaire, apportant sa couleur à l’énergie volcanique de James Brown, à la puissance lisse de The Power Station, au swagger insatiable des Rolling Stones, aux échos hantés de Robert Plant, au feu gospel de Ray Charles. Il a été partout et nulle part à la fois, à la fois indispensable et invisible, de ces musiciens dont l’empreinte est partout dans la musique de nos vies, même si son nom n’a pas toujours occupé la lumière des affiches. Mais qu’on ne s’y trompe pas: Litteral n’est pas qu’un accompagnateur exemplaire. C’est un artisan de rare intelligence, un compositeur et arrangeur qui possède une alchimie secrète, capable de dissoudre les frontières de genres pour qu’on ne se demande plus si sa musique relève du funk, du jazz ou d’autre chose. Elle appartient, avant tout, au vocabulaire du cœur, celui de la passion.

Dans ce nouvel album, Litteral se tourne vers Steely Dan, ces architectes d’une sophistication urbaine. Mais il ne se contente pas de revisiter: il réécrit, il réinvente, il resculpte. Comme s’il avait pris leurs tours polies d’harmonies pour y tailler de nouvelles fenêtres, laissant le soleil entrer sous d’autres angles. Des décennies d’expérience, sur la route, en studio, toujours au milieu du son, lui ont donné la confiance de remodeler des chansons familières sans crainte, d’ériger des productions grandioses qui ne perdent jamais leur intimité. La trompette, curieusement, n’est pas projetée au premier plan. Elle flotte plutôt comme un maître de cérémonie, discret, guidant plus qu’imposant, offrant l’espace aux voix et aux autres instruments. Chaque arrangement est un équilibre de poids et d’air, de rythme et de silence. Et puis vient son «Do It Again»: une version si stratosphérique qu’elle semble tirée d’une bande originale de film, un son qui ne remplit pas seulement une salle mais tout un horizon.

D’abord, le disque séduit le corps, ses grooves chaloupent, ses surfaces miroitent, et l’on pourrait se contenter de le laisser couler en bande-son du plaisir, du mouvement, de la danse. Mais à l’écoute attentive, un autre niveau se dévoile. Ces chansons, célèbres ou moins connues, ne sont pas seulement ravivées mais véritablement réincarnées; elles brillent d’un nouvel éclat tout en révélant leur grain secret. Faire cela n’est pas seulement un exercice d’arrangement, c’est un acte de révérence, presque de noblesse: reprendre ce que l’on croyait familier et en dévoiler l’architecture intime, rappeler la beauté secrète que nous avions peut-être négligée.

Et quel est le langage de cet album? Il parle avec les accents du funk comme du jazz, glissant de l’un à l’autre sans jamais rompre le flux. La frontière entre les deux est mince, parfois invisible, car leurs racines boivent à la même rivière. Si le funk est le corps et le jazz l’esprit, alors la musique de Litteral est le pont, le flux vital qui unit les deux, la circulation sanguine qui traverse continents et cultures. Entre ses mains, ces chansons cessent d’appartenir à une tradition ou à une autre; elles deviennent une monnaie commune, une musique qui appartient à tous ceux qui savent en sentir le balancement.

Au bout du compte, l’album de Paul Litteral est moins une simple collection de morceaux qu’une déclaration de philosophie: que la musique, lorsqu’elle est vécue pleinement, transcende les catégories qu’on tente de lui imposer. C’est la mémoire remodelée, la passion disciplinée, l’expérience métamorphosée en son. Et par-dessus tout, c’est la joie, la joie façonnée par un homme qui a longtemps cheminé dans l’ombre des légendes, avant de s’avancer pour nous rappeler que la trompette, comme la voix humaine elle-même, peut porter non seulement des notes, mais du monde entier.

Thierry De Clemensat
Member at Jazz Journalists Association
USA correspondent for Paris-Move and ABS magazine
Editor in chief – Bayou Blue Radio, Bayou Blue News

PARIS-MOVE, September 17th 2025

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Musicians:
Paul Litteral – Trumpet
Tony Pia – Drums
Bill Bodine – Bass
Sam Morgan – Sax
Kyle Zimmerman – Guitar
Shante’ Palmer – Trombone
Rocky Davis – Keys
Craig Kupka – Trombone
Colin Kupka – Sax

Track Listing:
Home At Last
Give It Everything You Got
Black Crow
Ghostown
Do It Again
New York By Dreams
Use Me
Dying To Live
Virtual Insanity
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