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En sempiternel Dadaïste, Pascal Comelade délivre (si l’on y inclut les vinyles et K7) ce qui doit bien constituer son quarantième album en près d’un demi-siècle de carrière. Tombé tout petit dans l’Hérault, c’est toujours depuis son vivier montpelliérain qu’il nous adresse de ses nouvelles, et cette nouvelle livraison ne déparera pas sa foisonnante discographie. Adepte impénitent du collage et du détournement (d’instruments, d’objets ou de registres culturels), il plante le décor dès “Choni Bi Gutt” (variant du “You Really Got Me” des Kinks, de “We Did It Again” de Soft Machine et du “Dropout Boogie” de Captain Beefheart) et “Skyn Saxo Derivato” (hommage ludique aux Seeds, avec Farfisa façon Daryl Hooper/ Ray Manzarek). Si ce qui l’attache à ses premières amours garage est désormais universellement connu (comme en témoignent ses récentes collaborations avec les Limiñanas), la pataphysique si chère à Boris Vian, Robert Wyatt et Ramon Pipin se perpétue aussi, que ce soit par le choix des titres (“Apparition Du Visage de Bela Lugosi Sur Une Tranche De Salami”, avec la trompette de Jac Berrocal citant Don Cherry et le voisin Tony Truant à la surf guitar), ou son amour de Nino Rota et Ennio Morricone (“El Mal Ja Esta Fet”, “Sea Yu L’Ether Arigato” et cette “Musique Hypertrophique Des Remontoirs”, qui revient en coda sous-tendre la lecture de “L’Orgie Parisienne” de Rimbaud par René Vienet). Avec pas moins de cinq guitaristes invités (dont Martin Daccord, premier gratteux des Limiñanas), les pianos jouets, et ukulélés, thérémines et accessoires dignes du Brian Jones de “She’s A Rainbow” et “Dandelion” prolongent les climats post-psyché hérités de la fin des sixties (“Final Del Districte V”, avec la disto-guitar de Leo Estalles, ou “Nothing But U” et celle de Lalo Lopez), tandis que sur une trame apaisée de piano et de violoncelle, “Cimetière De La Photographie” célèbre l’amour persistant de Pascal pour Erik Satie. À la fois trublion et intello, cultivé et primitif, Comelade s’obstine donc à rapprocher vaillamment l’avant-garde du populo, en actes et sans baratin. Un disque d’utilité publique, en somme…
Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
PARIS-MOVE, September 25th 2022
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