Americana, Rhythm 'n' Blues, Techno-pop |

Pour son dixième album en un quart de siècle (si l’on y inclut bien sûr ceux réalisés avec son band), le bellâtre danois s’est fait la tête de Mark Everett (leader de Eels). La cinquantaine venue (avec un divorce à la clef), notre homme s’est en effet résolu à assumer ses lunettes de vue, ainsi que le sel qui gagne inexorablement sur le poivre dans son système pileux. Moins connu sous nos latitudes que Thorbjørn Risager & The Black Tornado, Mike Andersen n’en compte pas moins parmi les fers de lance de la scène blues dans leur pays commun, le Royaume du Danemark, où s’il paraît (du moins selon Shakespeare), qu’il subsiste quelque chose de pourri, ce n’est certainement pas sa musique. Si l’on retrouve quelques usual suspects à ses côtés (les batteurs Mads Andersen et Jens Kristian Dam, ou le guitariste Johannes Norrelyke, qui officie également aux claviers et aux chœurs), c’est surtout au pianiste Christian Ki que Mike rend hommage, pour sa contribution aux arrangements de ces dix nouvelles compositions. D’obédience plus Americana-noir que de coutume, cet opus s’ouvre sur la plage titulaire (entre Oscar Benton, Tom Waits et Leonard Cohen), à laquelle des chœurs, un violon et un violoncelle confèrent le climat sépulcral qui sied. Plus surprenants encore, avec leur drum-machine et leurs synthés, “Don’t Waste Your Time” et “Clean House” s’apparentent à la période “Low” de Bowie, ainsi qu’au Robert Palmer de “Johnny And Mary”. Sorti en single (de même que “Don’t Waste Your Time”), “Only For You” est une émouvante blues lullaby dans l’esprit de Keb’ Mo, où Mike s’accompagne d’une simple guitare acoustique, tandis que le sépulcral “Souls On Fire” le voit par-contre assumer presque tous les instruments (violon et violoncelle exceptés), sur un pattern orientalisant nimbé d’écho-delay. Les excellentes surprises abondent au fil de cet album atypique, ainsi des soul ballads “Before I Was Good” et “Falling For You”, évoquant sans rougir les grands Ray Charles et Sam Cooke (chœurs féminins gospel à la rescousse), et du ravissant “Haïtian Lady” (entre Stevie Wonder et Steely Dan dernière époque). En réponse aux puristes qui ne trouveraient pas ici leur compte, “Big Mouth” s’avère un de ces talkin’ blues sur lesquels John Lee Hooker et Lightnin’ Hopkins excellaient, avant que le conclusif “Pack Your Bags” n’achève de sceller en solo intégral le destin d’une relation finie. Forcément à part dans sa discographie, ce disque s’avère le plus sincère et personnel que Mike Andersen ait jamais livré, et osons l’écrire, sans doute l’un de ses tout meilleurs. S’il faut effectivement souffrir pour son art, Mike a dû manifestement bien morfler cette fois. Condoléances, man, mais aussi merci, du fond du cœur. Et surtout, bon courage pour la suite…
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, August 27th 2025
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