MATTHEW DEAR – Preacher’s Sigh & Potion: Lost Album

Ghostly International / Modulor
Electro-Americana
MATTHEW DEAR - Preacher's Sigh & Potion : Lost Album

En près de deux décennies, le chanteur, compositeur, producteur et DJ Matthew Dear a aligné une quinzaine d’albums, et le quadruple d’E.P.s, singles et remixes divers (sous sa véritable identité ou une foultitude de prête-noms, de Jabberjaw à False et Audion). Natif du Texas, ce garçon s’est immergé dans la scène techno de Detroit au début de ce millénaire, au point d’en devenir l’un des représentants les plus reconnus. Dix ans avant sa naissance, son propre père connut une brève carrière en tant que guitariste folk-blues, et c’est à celui-ci que Matthew voulait rendre hommage, en composant la dizaine de plages qu’il délivre à présent. Conçues en 2008 et 2009, celles-ci ne voient peut-être le jour que pour des raisons intimes (la crise de la quarantaine?), mais il eût indéniablement été regrettable qu’elles demeurassent secrètes. “Muscle Beach” (dont le refrain donne son titre à l’ensemble) sonne ainsi comme la rencontre improbable entre le regretté Alan Wilson de Canned Heat et Kraftwerk, “Sow Down” évoquant celle, encore plus improbable, de Merle Haggard et Ananda Shankar, tandis que le bref et délicat “Never Divide” (mené sur un loop de guitare en arpège) alterne murmure de baryton et falsetto sur vocoder. Le splendide “All Her Fits” évoque des seventies dont le souvenir, sans doute autant déformé par la nostalgie que par les nouvelles technologies, revêt un caractère confus. “Supper Times” renoue avec la veine techno habituelle de Matthew Dear, et sur un riff de basse slappée, les répétitifs “Crash & Burn” et “Head” rappellent le Can de “Ege Bamyasi” (quand Damo Suzuki y succédait à Malcolm Mooney), avec une frénésie digne d’un Wilko Johnson sous ecstasy! Soutenu par le sample en boucle du son d’une pelle (de fossoyeur?), l’élégiaque “Head” et ce “Gutters And Beyond” de fin de soirée concluent sur un mode cinématique cette collection, que l’on n’imagine destinée ni aux puristes de l’électro, ni à ceux du blues ou de la country, mais dont les fonds conjugués constituent pourtant la matière. Avec ce Lost Album exhumé de ses archives personnelles, Matthew Dear semble en tout cas déterminé à promouvoir une techno fermement ancrée dans l’organique, et c’est sans doute là qu’en réside l’originalité.

Patrick Dallongeville

Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, June 6th 2021

::::::::::::::::

MATTHEW DEAR – Preacher’s Sigh & Potion: Lost Album – un album à commander sur le Bandcamp de l’artiste, ICI

Album disponible en numérique, CD, vinyle noir et… édition limitée vinyle marbré jaune + noir.