Country

Produit (comme chacun de ses prédécesseurs) par le sorcier des six et douze cordes Steve Dawson (qu’elles se grattent ou qu’on leur glisse dessus), ce quatrième album du Canadien Matt Patershuk célèbre autant qu’il les outrepasse les canons d’une country bon teint. Ne dédaignant pas les accents twangy chers à Chris Isaak, non plus que les routes poussiéreuses des westerns de Tarantino (l’instrumental “Horse 1 (For Bravery And Good Fortune)”, ce singer-songwriter d’Alberta (bled rural au nord du Canada) ne répugne pas non plus à adapter en honky-tonk le “Sugaree” de Robert Hunter et Jerry Garcia (qui figurait sur le premier album solo de ce dernier, et que le Dead reprenait sur scène). Mais ce sont bien ses dix compositions originales qui font ici la différence: magistralement arrangées, “Circus” et “Last Dance” n’auraient ainsi pas déparé les répertoires respectifs de Lou Reed et Leonard Cohen. Outre la pedal-steel larmoyante de Dawson et les violon et violoncelle de ses choristes féminines, le légendaire Charlie McCoy preste ici son harmonica virtuose et sensible, comme il le fit sur tant de classic albums auparavant (de Dylan à Presley et Roy Orbison). Il faut l’entendre en pousser une sur le second-line beat louisianais “Velvet Bulldozer” (hommage à Albert King, ce qui, vous en conviendrez, n’est guère commun en pareil contexte). Matt Patershuk s’avère néanmoins capable de concocter de pures Nashville tunes comme “Let’s Give This Bottle A Black Eye”, “Bear Chase” ou encore “Walkin'”, tout en s’accordant l’occasionnelle escapade sur les sentiers de Bakersfield (“Red Hot Poker”). Ce que j’ai toujours apprécié dans la country (comme dans la soul), c’est qu’il me semble n’en exister que deux sortes: la merdique et l’excellente. Cet album appartient définitivement à la seconde de ces catégories.

Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, November 27th 2019

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