MARK BROWN – Happy Hour

Autoproduction
Americana
MARK BROWN - Happy Hour

Pour son troisième album seulement en une vie déjà bien remplie, le singer-songwriter et guitariste Mark Brown délivre 14 nouvelles compositions, pour la plupart puisées à la substantifique moelle de l’expérience. À l’humour tongue-in-cheek de John Prine et au timbre nasal et éraillé de Willie Nelson (ainsi qu’au flegme éculé de Johnny Cash), il se permet d’ajouter la truculence iconoclaste de notre non moins regretté Arno Hintjens. Ainsi du “Scratch” d’ouverture (auquel il se paie le culot d’intégrer des cocottes disco) et du chamboulé “Davenport” (où le drumming facétieux du dénommé Dean Sharp nous porte à penser qu’il puisse s’agir du même D-Sharpe qui sévissait il y a plus de quarante ans auprès de Jonathan Richman). Ces transgressions posées, notre homme revient comme si de rien n’était à quelques honky-waltzes désuettes à souhait, dans l’esprit du “Muswell Hillbillies” des Kinks (“Inertia” et “Napanoch”, avec respectivement pedal-steel et accordéon à l’appui). La plage titulaire nous fond dessus comme le “Mojo Working” échevelé que revisitait jadis J.J. Cale (auquel s’apparentent aussi “Deer Cut And Wrapped”, “The Ridge” et “God Bless Me Jesus”), mais cette fois en versions chorale de bar. La country bon teint n’en reprend pas moins ses droits avec “Long Time”, mais notre homme ne reste jamais longtemps en place, comme en atteste la rumba sinueuse “Gasoline Hands” (avec les chœurs mutins de Katie Mullins et l’orgue facétieux de Dean Jones). Le dépouillé “Broken Glass” sonne comme le lointain cousin du Tom Waits de “Closing Time”, tandis que le faussement enjoué “Acetone” évoque un Leonard Cohen d’humeur festive (on ne se gausse pas, il paraît qu’en privé il était à se tordre), et que “The Unanswered Prayer” ne conclue entre Calvin Russell et Johnny Dowd. Un disque épatant à plus d’un titre: imaginez Jean-Pierre Bacri accompagné par la crème des studios de Nashville…

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, June 14th 2024

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