Malcolm Holcombe – Not Forgotten

Munich Records – MRCD 285
Rock
Déjà, rien qu’à voir la photo de couv du livret y’a comme des signes qui ne trompent pas, des signes qui vous font dire que le mec, là, il doit être quelqu’un: rouflaquettes style côtes de porc comme celles du Neil Young des 70’s, épreuves de la vie marquées sur le visage façon Calvin Russell, mais en moins sévères, ouf, et ces pages d’écriture comme ciel gris clair, tout nous annonce un opus racé, jouissif, d’un vrai songwriter moderne.
 
Effectivement, dès le premier titre, ‘Sparrows and Sparrows’, joué en acoustique, la voix du mec vous prend aux tripes, mélange détonnant de Calvin Russell et de Tom Waits, avec ce côté râpeux qui vous fait dresser les poils, vous fait reverser une bonne gorgée de cet excellent breuvage irlandais à la teinte lumineuse qui vous donne le feu intérieur. Dans la même ligne, le titre suivant, ‘Goin’ Home’, vous transporte dans un univers où la poussière vous fera tousser, où le soleil vous fera chercher l’ombre d’un cactus et où le premier motel paumé deviendra le plus beau des palaces. Et là, au fond de la salle, y’a un mec qui vous chante à la guitare acoustique un truc à vous fendre l’âme, avec ces râles dans la voix qui font frémir, qui vous font comprendre que le mec en a vécu, des trucs.
 
Goin’ Home ; rentrer à la maison. Comment après une telle chanson quitter ce rade paumé pour reprendre la route… Impossible. Alors vous restez, et vous écoutez la suite, et ce mec qui vous chante ‘A Steady Heart’, accompagné par deux potes, un à la basse et l’autre au dobro, et dont le jeu, tout en finesse, punaise, vous file une nouvelle volée de frissons. Y’a des jours, y’a des nuits comme ça…
 
Mais cette première partie acoustique terminée, le Malcolm vous montre qu’il sait aussi vous proposer des titres plus vifs, comme ce ‘Baby Doll’, avec banjo, dobro, harmonica, basse et batterie, qui vous balaye tout sur le passage en moins de deux minutes trente. Car le bougre ne donne pas dans les longueurs et les soli instrumentaux superflus ; cela va à l’essentiel: paroles et musique ne sont pas là en faire valoir l’un pour l’autre mais sont complémentaires, dans une enveloppe fusionnelle où la guitare ne saurait exister sans l’harmonica, la batterie sans la voix, la basse sans le banjo, la basse sans le dobro, et versa dans le vice.
 
D’autres titres, comme ‘Cryin’ Dime’, avec gratte électrique, transforment l’arrière salle du motel en juke joint où le son poisseux et torride vous fait transpirer, avant que le mec ne vous offre avec ‘Not Forgotten’ un titre dont le son de la gratte acoustique rappellerait presque furieusement un certain J.J. Cale. Et pas que le son de la gratte acoustique, mais aussi celui de la six cordes électrique, et cette voix, cette voix sublime qui vous offre en moins de deux minutes trente une chanson à faire figurer dans les compils des meilleurs titres de ce début de siècle. Une chanson qui touche tout simplement au sublime.
 
Vous dire qu’après avoir écouté Malcolm Holcombe vous repartirez sur la route comme avant serait vous mentir. On ne sort pas indemne d’une telle rencontre, et c’est tant mieux. Précipitez-vous sur ‘Not Forgotten’ et vous direz comme moi: exceptionnel, tout simplement.