Americana |
Au train où vont les choses, il va bientôt être plus difficile encore de débuter une carrière musicale à trente ans. En effet, sur un marché dominé par des quinquagénaires (et bien au delà si affinités), les nouveaux impétrants s’avèrent de plus en plus précoces. Ainsi de la jeune Madison Galloway, qui à 19 ans à peine (et après un E.P. 5 titres) déboule avec son premier album. Déjà auréolée d’une solide réputation de live performer, cette Canadienne native de Fergus dans l’Ontario y assure non seulement les parties de guitare (slide, acoustique, électrique et banjo), mais également les claviers et l’harmonica. Non contente de composer l’essentiel de son répertoire, elle possède en outre un registre vocal puissant et évocateur. Véritable avatar de l’espace-temps, elle affiche des références relevant à son échelle de la préhistoire! Ainsi de la plage d’ouverture, “Can’t Buy Time”, cavalcade folk-rock dans l’esprit du “Bringing It All Back Home” de Dylan (harmo zinzinant à l’appui), pour bifurquer sur un diddley-beat au refrain, et des accords hindouisants sur le pont! D’autres influences se font jour, comme celle des Balkans sur “Beginnings & Ends” (accordéon, trombone, rires et verres tintinabulants inclus), et ces accents orientaux qui s’accentuent sur l’instrumental “Coffee Stains”, introduisant sitar, tampura, tablas et hurdy-gurdy, comme au temps béni où Jimmy Page et Robert Plant se retrouvèrent pour un “No Quarter” qui en assumait pleinement l’héritage. On ne se trouve dès lors pas encore chez Ravi Shankar, mais Harry Manx n’est pas bien loin. Madison Galloway s’avère aussi capable d’évoluer dans un registre ragtime country blues bon teint (“Bye Bye”), ou dans un folk-rock musclé façon Sheryl Crow (“Doors”, “Infectious Eyes”). Elle est soutenue dans cette entreprise par une solide brochette de musiciens, au premier rang desquels on distingue les multi-instrumentistes Jonathan Markov et Ron Hawkins (de Lowest Of The Low), qui produit le tout et duettise avec la jeunette sur “Season of Treason”. Capable de howler le Delta blues comme une adulte (“My Baby Don’t Care”), elle conclut cette galette par sa seule reprise, le traditionnel “House of The Rising Sun”, dont elle précise qu’elle s’y réfère à la version des Animals, même si son final à l’harmonica renvoie une fois encore à ce gamin de Duluth qui révolutionna le folk voici déjà presque soixante ans. Si le méchant show-biz ne l’avale pas toute crue, cette nouvelle venue a déjà tout d’une grande: à suivre, et de près…
Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
PARIS-MOVE, August 26th 2019
MADISON GALLOWAY – Moon & Mercury : album disponible sur son Bandcamp, ICI
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