Rock |
Voici un bon quart de siècle, j’étais allé avec mon pote Éric voir Crazy Cavan au Fort de Mons-en-Barœul. Mal nous en prit : avec ses longues douilles filasses et ma boule à Z, on n’avait pas le dress-code requis, et on dut prendre nos baskets à notre cou pour ne pas se faire lyncher par la bande de Teds qui nous coursait ! Cette anecdote pour expliquer (en partie) les préjugés qui perdurent encore envers le rockab’ et ses dérivés. Le péquin moyen n’entravant pas forcément la différence entre les Forbans et les Meteors, l’image virile du rocker rétro projette une ombre ambiguë, l’assimilant parfois aux pires mouvements réacs. Comme si le rock dit progressif avait fait progresser la société de quelque manière ! Heureusement, nos LUCKY DEVILS n’ont rien à battre de ces foutaises. Trop occupés qu’ils sont à défoncer tout obstacle qui oserait s’interposer entre leur psychobilly speedé et leur quête du Graal. Celle qui unirait en une croisade sacrée les esprits chafouins de Lux Interior, Gene Vincent, Johnny Kidd et Johnny Burnette, pour instaurer enfin un califat musical exempt de tout sectarisme envers la Bible de Memphis.
Trêve de déconne : notre trio local préféré livre, outre le live furibard du concert célébrant leurs 15 ans d’existence, un plein CD d’adaptations rockab’ de standards pop transgénérationnels. De REM à Matt Bianco, en passant par les Stones, Kinks, Four Tops, Zombies, Clash, Kiss, Blondie, Chris Isaak, Specials et Midnight Oil, leurs covers réaffirment le message universel des Stray Cats et de Miles Davis : il n’existe au fond que deux sortes de musique, la bonne et le reste… Celle qu’ils proposent ici est tout bonnement jubilatoire !
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Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder