Electro-Americana

Avec son second album en cinq ans, la Canadienne Lauren Gillis pose une question fondamentale: peut-on pratiquer l’Americana (genre aux contours mal définis) tout en s’affranchissant de ses codes instrumentaux…? À savoir, serait-il possible d’exécuter des country waltzes aussi poignantes que “Fly To Heaven”, “California” et “Crazy Bird” avec pour seul accompagnement une beat box, des synthés et un (gulp) saxophone ? Tout comme de remplacer la steel-guitar qu’appelle de fait le spleen agraire de la plage titulaire par des claviers numériques ? En dépit de leur thématique, “Full Moon Town” et “Angel” sonnent ainsi presque comme des inédits de Madonna. Sacrilège, blasphème et hérésie ?
Si les compositions magistrales qu’elle aligne ici ne l’en préservaient pas, on pourrait certes hurler à la trahison, voire au traitement baloche d’un genre ne s’y prêtant parfois déjà que trop. Mais l’impeccable production au cordeau de Sturgill Simpson sublime le pouvoir émotionnel d’une chanteuse terrassante (capable d’évoquer la grande Patsy Cline sur les languides “Out Of The Rain” et “Talk To Myself”). Porté par un simple piano acoustique, le sépulcral “Lover Don’t Give Up On Me” achève d’emporter toute réticence. Un talent majeur pour un disque certes déroutant, mais d’une indéniable beauté.

Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, June 1st 2019

LUCETTE – Deluxe Hotel Room – à commander en vinyle, ICI
(9 Track With Inner Sleeve And Download Code (rcm7003) – Released 17/05/19)

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