LORI McKENNA – The Balladeer

Creative Nation / Thirty Tigers
Americana
LORI McKENNA - The Balladeer

Née Lorraine Giroux à Stoughton, Massachussets (trois jours avant Noël 68), Lori McKenna propose son onzième album en vingt ans de carrière. Mère de cinq enfants, elle est également une songwriter très demandée, puisqu’elle a écrit (ou co-signé) plus de 80 chansons pour des artistes aussi divers que Tim McGraw et son épouse Faith Hill, ou encore Alison Krauss, Steel Magnolia, Little Big Town, Caitlyn Smith ou Wade Bowen. Il suffit de prêter l’oreille à cette nouvelle livraison pour en comprendre la raison: cette artiste possède en effet un sens de la tournure (et de la tournerie) qui prodigue à son art une incontestable accessibilité. Fermement établie au sein de la prolifique scène de Nashville, elle en tire sans doute davantage de revenus en tant qu’auteur-compositeur que comme performer. On en saisit le caractère éminemment consensuel dès l’orthodoxe country number “This Town Is A Woman” (qu’elle chante à l’unisson de Karen Fairchild et Kimberly Schlapman). Confirmant sa propension à ciseler de petits classiques folk à la manière d’un Paul Simon, la plage titulaire est une ode (pour partie auto-célébratrice) à la fonction de troubadour. Toujours porteuse d’empathie envers ses consœurs, Lori en dresse avec “Marie” un nouveau portrait saisissant. N’a-t-elle pas ainsi déjà recensé, au fil de titres tels que “Grocery Store”, “Three Kids No Husband”, “Sad Girls” ou “Grown Woman”, un pertinent inventaire de la condition féminine américaine? Parmi certaines mélopées un brin convenues (“The Dream”, “Good Fight”, “Two Birds”), émergent tout de même quelques pépites telles que le délicat “Uphill” ou le désabusé “Stuck In High School”. Elle troque sa guitare pour le piano sur les poignants “When You’re My Age” et “Till You’re Grown”, qu’elle adresse manifestement à ses propres rejetons. Poursuivant son parcours d’équilibriste entre mainstream revendiqué et confessions suffisamment bien troussées pour emporter l’assentiment de la majorité silencieuse, Lori McKenna est aussi représentative de l’Amérique blanche profonde que peut l’être Dr Dre de celle des relégués des ghettos urbains. Deux facettes d’une même société, décidément guère plus complexe que la nôtre.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, July 11th 2020