LORD YOUTH – Gray Gardens

BB*Island / Differ-Ant
Urban folk

“Gray Gardens”… Dans le recoin d’un bar lounge semi-désert, au bout d’un jetée balnéaire hors saison, un clone de Leonard Cohen ânonne son spleen infini sur un fond musical décalé, entre calypso catatonique, hillbilly révisé en mode Jonathan Richman (“Someone Was Singing Hi Ho Silver”, “What’s That Sound”), B.O. de série Z façon Roger Corman, et blues déconstruit à la Tom Waits. On songe à la bande son idéale pour “Les Vrais Durs Ne Dansent Pas” de Norman Mailer, ou à une version alternative de celle de “Sailor et Lula”. Bref, c’est loose au possible, comme si Captain Beefheart revenait produire les albums posthumes de Lux Interior (“Plastic Bombs”) et Johnny Cash (“Everybody’s Listening To The Fire”). Ces climats nauséeux (dont l’auteur, un certain Micah Blaichman ne parvient occasionnellement pas à réprimer un rot) n’en exercent pas moins une inexplicable séduction. Sans doute la mémoire reptilienne de vos plus sévères gueules de bois. Rien entendu de plus voodoo (“Moonbelly”) et comateux (“The Room Is On Fire”, “Cypress Grove”) depuis cette sorcière de Sandy Dillon. Bref, si vos voisins vous empoisonnent la vie avec leur fiesta permanente, distillez leur ce “Gray Gardens” en guise de traitement entre les lattes de leurs lambris. Si au moins l’un d’entre eux n’en finit pas sous neuroleptiques, faîtes-vous rembourser l’acquisition de ce disque auprès du label ci-dessus mentionné.
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Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder