LON ELDRIDGE & STEVEN TROCH – Cool Iron

Tud Thumper Records
Blues

Authentique hurluberlu natif de Chattanooga, Tennessee (localisation d’une sanglante bataille durant la Guerre de Sécession), Lon ELDRIDGE est une sorte de prolongement de feu Bob Brozman, au croisement du jeune Leon Redbone (pour peu que pareille évocation revête quelque sens) et de Robert Crumb (dont il partage, à un demi-siècle de distance, la collectionnite aiguë). Car outre une demi-douzaine de phonographes, ce gugusse amasse les cylindres et 78 tours qui constituent la mémoire primitive de nos musiques dites actuelles. De Robert Johnson à Mamie Smith, en passant par Bessie Smith et l’habituelle palanquée de semi-anonymes que charrie ce genre de moisson. Quant à Steven TROCH, harmoniciste flamand de la bonne ville de Mechelen, il y dirige son propre quartet, en passe d’occuper une position déterminante dans le renouveau du blues sur notre Vieux Continent. La Belgique demeurant ce creuset culturel où toutes les rencontres sont possibles (de James Ensor à Arno), celle de Lon ELDRIDGE et Steven TROCH eut lieu au cœur des polders, au club N9 d’Eeklo. Étincelles, coup de tonnerre… “Parce-que c’était moi, parce-que c’était lui”, comme disaient naguère Montaigne et La Boétie: ces deux-là se reconnurent à la première tierce augmentée, et voici donc le fruit impromptu de cette collusion. Depuis la réjouissante adaptation du “You Can’t Get That Stuff No More” de Tampa Red jusqu’à celle du “Ain’t Misbehavin'” de Fats Waller, nos deux comparses revisitent ici Mance Lipscomb et Mississippi Fred McDowell, sans omettre la révérence de rigueur à Robert Johnson. Sept de ces neuf plages (captées dans un studio batave) s’augmentent de deux prises Live dans un bistrot du bled de Steve, ainsi que d’une saisissante alternative du “Kind Hearted Woman” de Johnson en ‘ghost track’. N’oubliez pas de garer la DeLorean en sortant de ce “Retour Vers Le Futur IV”…

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder