LLOYD JONES – Tennessee Run

Vizztone
Rhythm 'n' Blues
LLOYD JONES - Tennessee Run

Natif de Portland, Oregon (où les supporters d’un certain Donald T. se confrontent depuis des semaines aux prétendus anarcho-communistes de Black Lives Matter), Lloyd Jones publie depuis Nashville son dixième album en trente-deux ans. Prototype du musician’s musician (ainsi que du songwriter’s songwriter), ce lascar a non seulement vu ses compositions reprises par des anonymes tels que Joe Louis Walker, Curtis Salgado, Coco Montoya et Clarence Gatemouth Brown, mais a aussi suffisamment impressionné ce vieux briscard de Delbert McClinton pour que ce dernier en fasse l’invité récurrent de ses légendaires Sandy Beaches Cruises. C’est qu’outre sa connaissance intime du répertoire R&B des forties et fifties, le dénommé Lloyd Jones est tout sauf un triste. Plutôt le genre de gusse que vous inviteriez à votre anniversaire de mariage pour réveiller les beaux-parents, sans provoquer pour autant de generation gap incident. À preuve, quel film plus transgénérationnel que les Blues Brothers? Le “You Got Me Good” introductif évoque ainsi un croisement entre le “I Can’t Turn You Loose” d’Otis Redding (via les pseudo-frangins enlunettés) et le “Papa’s Got A Brand New Bag” du réverend James Brown. Il faut avouer qu’avec une section rythmique digne des MGs, les claviers soulful du terrassant Kevin McKendree et des cuivres aux petits oignons, ce brave Lloyd aurait tort de se priver. Ce qui en découle est à l’avenant: depuis l’enlevé “Me & You” (Louis Prima meets Solomon Burke) jusqu’au très Johnny Guitar Watson “Where’s My Phone?” (novelty tune par excellence de notre époque cellulaire), tout se trouve ici agencé de manière à secouer les popotins (profitez-en, en raison de la réduction de l’espérance de vie, le troisième âge opère ces derniers temps un retour en force). Avec son piano virevoltant à la Johnny Johnson, “Wish I Could Remember Loving You” dresse ainsi un pont bienvenu entre Chuck Berry et Hank Ballard, tandis que comme son titre l’indique, “Bayou Boys” emmène l’auditoire parader dans les avenues de la Crescent City, où se trémousse encore l’esprit de Dr. John. Delbert McClinton passe en ami donner la réplique sur le très Huey ‘Piano’ Smith “Everybody’s Somebody’s Fool” tandis que “That’s All I Want” puise à la même veine, que “Turn Me Loose” lorgne éhontément vers Louis Jordan, et que “Chicken Bones” en fait autant pour Johnny Jenkins. Le timbre voilé du patron (à équidistance entre Southside Johnny et Peter Wolf) lui permet d’accoster les rives embuées de regret de l’un des master-american outfits, le J.Geils Band (“A True Love Never Dies”, “Everytime We Meet”, “Love Is Eveything”, “Dilly Dally”, “Chevrolet Angel”), tandis que son jeu de guitare (aussi funky en mode rythmique que sur les choruses) ne cesse d’attiser les braises. Bon Dieu, voici donc bien le good time record qu’il nous fallait pour lutter contre cette COVID de circonstance! À ce propos, connaissez-vous la blague belge en vigueur? “Pour l’achat de deux Corona, une Mort-Subite offerte”…

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, September 11th 2020

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