LIZZ WRIGHT – Shadow

Blues & Greens / Lightyear / Virgin
Blues, Folk, Soul
LIZZ WRIGHT - Shadow

À l’heure où paraît son septième album en plus de deux décennies, on ne pourra pas accuser Lizz Wright de saturer le marché. Née en Georgie comme maints ténors des musiques afro-américaines avant elle (Ray Charles, James Brown, Little Richard, Otis Redding, Gladys Knight, Sharon Jones, Arthur Conley, Chuck Willis, Dave Prater…), cette fille de pasteur commença à chanter dans la chorale de son église, comme la tradition l’exige. Repérée dès le début du millénaire au sein de l’ensemble In The Spirit, elle fut invitée par Joe Sample (claviériste des fameux Crusaders) sur son LP “The Pecan Tree”, et signa chez Verve, qui publia en 2003 son premier album, “Salt”, produit par Tommy LiPuma (Diana Krall, George Benson…). Ce coup d’essai se hissa à la seconde place des charts jazz, et 2005 la vit proposer “Dreaming Wide Awake” (produit cette fois par Craig Street, par ailleurs en charge de Norah Jones et Cassandra WIlson), qui atteignit alors le sommet des mêmes classements. Street officia encore sur “The Orchard” en 2008, suivi de “Fellowship” en 2010, “Freedom & Surrender” en 2015 et “Grace” en 2017. Si elle a encore publié un album live en 2022 (“Holding Space”, restituant un concert à Berlin de 2018), on ignore pour quelles raisons la genèse de ce “Shadow” prit si longtemps, mais Lizz en donne un indice en dédiant ce disque à la mémoire de sa grand-mère. Dès le “Sparrow” introductif et son beat ouest-africain (featuring Angelique Kidjo pour co-writer et co-vocalist), on retrouve les chaleureuses qualités d’empathie spirituelle qui caractérisent Miss Wright, que confirme “Your Love” (avec la basse de Meshell Ndegeocello et la harpe de Brandee Younger). De même que chez Randy Crawford et Tracy Chapman, son héritage gospel affleure en toute occasion, comme en atteste ce “Roots Of Mercy” dont elle assure elle-même les chœurs. Du holler au blues, il n’y a qu’un pas, que franchit allègrement la cover du “Sweet Feeling” de Clarence Carter (avec le Hammond B3 churchy de Kenny Banks Sr), où Lizz témoigne de sa profonde imprégnation du genre. C’est à la grande Aretha Franklin qu’incite à comparer le mélancolique “This Way”, poignante classic soul ballad à nouveau empreinte de gospel (et dont elle exécute à nouveau magistralement les chœurs et le lead vocal). C’est vers le folk qu’elle embarque avec ce “Lost In The Valley” hanté par le violon déchirant de Trina Basu ainsi que les délicats “Circling” et “Nowhere Will I Run”. Elle reprend encore dans ce registre le “Who Knows Where The Time Goes” de la grande Sandy Denny ainsi que le “I Made A Lover’s Prayer” de Gillian Welch (avec un déchirant solo de B3 de Banks Sr), et si sa relecture pour quatuor à cordes du “I Concentrate On You” de Cole Porter n’éclipse pas forcément celle de la grande Ella voici un demi-siècle, sa performance vocale n’en rivalise pas moins en émotion. Produit par Chris Bruce (partenaire de Bonnie Raitt, opérant aux guitare acoustiques et électriques, ainsi qu’au Fender Rhodes sur la plupart de ces onze titres), voici donc un album sensible, signalant le retour bienvenu d’une artiste sincère et émouvante.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, April 28th 2024

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