Blues |
Connaissez-vous l’enregistrement le plus frustrant de l’histoire du rock et du blues moderne? En 1965, Janis Joplin, tout juste débarquée à San Francisco depuis son Texas natal, capte avec le guitariste Jorma Kaukonen (futur Jefferson Airplane et Hot Tuna) une poignée de covers de vieux standards (dont “Trouble In Mind” et le “Nobody Knows You When You’re Down & Out” de Bessie Smith). Cette bande privée (et néanmoins historique) se trouve alors proprement ruinée par la petite amie du susnommé, qui tape allègrement à la machine dans la pièce à côté, tandis que le magnéto n’en peut mais… Les exégètes (dont je me compte) n’en démordent cependant pas: jamais plus la perle de Port-Arthur ne sonna comme sur ces enregistrements. Fragile certes, et encore terriblement empreinte de ses modèles, mais d’une puissance émotionnelle et d’une pureté que la future diva hippie ne retrouva ensuite que furtivement. Alors, je sais, le coup de la nouvelle Joplin, on nous le fait quasiment tous les cinq ans, et chaque fois, on se prend à ricaner. Sauf qu’à présent, non seulement, il y a VRAIMENT de ça (et de Kim Carnes aussi), mais en plus, la donzelle nous vient…d’ici! À peine âgée de 23 ans, Lena Mervil a déjà assuré les premières parties de Calogero et Ayo, et son timbre à la fois sensible et rocailleux fait réellement dresser les poils sur l’échine. Ses deux accompagnateurs (orgue et guitare) évoquent un autre fantasme: et si la Janis en question avait plutôt fait ses débuts auprès de Garth Hudson et Robbie Robertson, alors piliers du Band qui soutenait Dylan? Et sans machine à écrire, cette fois…