Latin Jazz |

Disparu à 93 ans le 26 juin dernier, l’Argentin anglo-hispano-francophone Lalo Schifrin demeure surtout connu du grand public pour ses bandes originales de films et de séries TV (de “The Man From U.N.C.L.E.”, “Mannix, “Mission Impossible” et “Starsky & Hutch” à “Luke La Main Froide”, “Bullitt”, “Dirty Harry”, “Opération Dragon”, “Magnum Force” et “Sudden Impact”). Sa phénoménale discographie n’en compte pourtant pas moins de 52 albums en tant que leader, auxquels il convient d’en ajouter une trentaine en collaboration avec d’autres artistes majeurs (de Dizzy Gillespie à Count Basie, en passant par Jimmy Smith, Stan Getz, Julia Migenes, Astor Piazzola, Cannonball Adderley et les trois ténors, José Carreras, Plàcido Domingo et Luciano Pavarotti), ainsi que 45 de plus regroupant ses thèmes dédiés au cinéma et à la télévision. Il n’avait que 23 ans quand parut son premier microsillon, un 25cm (format alors en vogue chez… Vogue), intitulé “Rendez-vous Dansant À Copacabana Avec Lalo Schifrin, Son Piano Et Ses Rythmes” (ouf), précédant de deux millésimes le LP orchestral “Spectrum” (sur Epic). Comme son successeur (“Piano Español”, en 1959 chez Tico Records), il ne s’agissait encore que de reprises, adaptées pour la plupart des répertoires jazz et afro-cubains en vigueur à l’époque (de Duke Ellington à Xavier Cugat). Surfant allègrement sur la cha-cha craze qui enflammait alors les pistes de danse, Lalo s’y distinguait (outre au piano) surtout par ses talents précoces d’arrangeur et de directeur d’orchestre (disciplines qu’il avait étudiées au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, sous l’égide de Charles Koechlin et d’Olivier Messiaen). Il fallut attendre 1962 pour entendre également ce jeune compositeur commencer à s’épanouir, avec le tiercé gagnant “Lalo = Brilliance (The Piano Of Lalo Schifrin)”, suivi la même année de “Bossa Nova: New Brazilian Jazz” et “Piano, Strings & Bossa Nova”. Ce sont donc ces cinq albums (et ce 25cm séminal) que présente ce précieux coffret, augmentés pour faire bonne mesure du “Soul Bossa Nova” qui constitua en 62 le premier chartbuster de son ami Quincy Jones (dont Lalo assurait non seulement le piano, mais aussi les arrangements orchestraux, et auquel il inséra son propre “Lalo Bossa Nova”, également présenté ici). Le livret concocté par Olivier Julien commente avec pertinence l’impressionnante carrière de l’artiste, tandis que comme de coutume chez Frémeaux, le mastering s’avère irréprochable. À l’image de celle de ses frères d’âme Quincy Jones et Michel Legrand, la trajectoire de Lalo Schifrin fut celle d’un transfuge hors du commun, magnifiée par le labeur inextinguible d’un bourreau de travail animé d’une curiosité toujours en alerte. Accéder à ses débuts discographiques, c’est assister à la genèse d’un géant. Les amateurs de cette niche nostalgique que l’on nomme en Belgique le popcorn se rueront avec gourmandise sur maints de ces trépidants instrumentaux vintage, qui animeront les rétro-parties Outre-Quiévrain avec le lustre qui sied.
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, September 3rd 2025
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