KRISTINA STYKOS – River Of Light

Thunder Ridge Records
Folk

Dès la plage d’ouverture, “State Line Diner”, deux atouts vous sautent aux tympans. Ce timbre de voix, d’abord. Râpeux mais néanmoins toujours juste, comme une combinaison de ceux de Bonnie Raitt et Patti Smith (parallèle accentué par “Climb This Ground”). Et ces lyrics, ensuite. Cette métaphore de la vie comme d’une vieille Chevrolet, incapable de passer le contrôle technique, mais dont on ne veut toutefois pas se séparer. Du grand art dans les deux registres, sur un folk-rock bon teint comme en alignait naguère encore le regretté Tom Petty. Qui d’autre s’avère encore capable de résumer en si peu de mots le malaise d’une génération? Pendant que vous cherchez la réponse, poursuivons cette chronique. Sur un mode Delta blues certifié, “I Want A Hard Hearted Man” synthétise en moins de trois minutes le mal-être de la condition féminine, et Simone de Beauvoir elle-même n’y aurait rien vu à redire. Ensuite, le jig & reel “Walking These Ridges” (propulsé par les drums vivaces de Steve Berlin ainsi que le fiddle de Patrick Ross) et le dépouillé “Breaking Trail” orientent le curseur vers le folk, scellant une connection avec le Dylan de “Blood On The Tracks” (qui se confirme sur le poignant “Since You Asked”). Car la Kristina n’a pas qu’une voix, elle dispose également de l’une des plumes les plus alertes parmi les singers-songwriters actuels. Elle se remet à peine d’une dysphonie spasmodique, le genre de mal qui empoisonna longtemps Linda Thompson (et un handicap majeur pour tout chanteur). Plus obstinée qu’un bourricot, elle déclara à la lecture du diagnostic: “Eh bien, si je ne peux plus chanter, je parlerai.”. Mais comme en attestent des titres tels que “In The Cleansing Rain”, cette pétroleuse n’a finalement rien perdu de ses capacités vocales. Au fil de son sixième album solo (capté au studio Pepperbox, qu’elle manage au cœur des Green Mountains du Vermont où elle vit), Kristina STYKOS ne célèbre rien de moins que la résilience. Ayant surmonté deux divorces et élevé seule trois enfants, elle se ressource désormais au contact d’une nature aussi belle que sauvage. Des plages semi-expérimentales comme “Caught By The Heart” (aux parties vocales évoquant furtivement le défunt Bowie) côtoient des hymnes poétiques dignes d’un Elliott Murphy (la plage titulaire, illuminée de la lead guitar du brillant Steve Mayone). Si Dylan avait été une femme, il aurait pu être Patti Smith (c’est du moins ce dont rêvait cette dernière). Nous savons désormais que ce rôle aurait sans doute mieux convenu à Kristina STYKOS.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, April 24th 2019

::::::::::::::::::::

KRISTINA STYKOS – River Of Light: disponible et à commander sur le Bandcamp de l’artiste, ICI

KRISTINA STYKOS – River Of Light on YouTube HERE
(the title track to Kristina’s 2019 album, River of Light. Produced, recorded and mixed by Kristina Stykos at Pepperbox Studio, Chelsea VT)

Official Facebook page: HERE