Blues |
C’est toujours un plaisir immense d’écouter une nouvelle galette de ce musicien prodigue né à la Nouvelle Orléans, en Louisiane. Son père, Rafus Neal, musicien lui aussi, harmoniciste, a de quoi frimer au paradis des musiciens car le rejeton est digne de son géniteur, et il n’est pas le seul à avoir du talent chez les Neal. Kenny chante, joue de la guitare et de l’harmonica, lui aussi, sur douze morceaux qu’il joue avec un combo dans lequel on retrouve, sans surprise, quelques musiciens qui portent le même nom que lui. Ce qui semble normal puisque la musique, chez les Neal, c’est une histoire de famille. Tyree Neal, à la guitare rythmique, est le neveu de Kenny, Darnell Neal, bassiste, est un frère de Kenny, Fredrick Neal, organiste, est un autre frangin et Kenny Neal Jr, batteur, est le fils du héros du jour. Et lorsque l’on parle de liens particuliers, ce n’est pas seulement de consanguinité dont je parle… Lucky Peterson au piano, au clavinet, à l’orgue, aux claviers et au synthétiseur et les deux contributions de Tony Coleman à la batterie en sont la preuve.
Inutile de préciser que chacun des passages de Kenny Neal au club Lionel Hampton de l’Hôtel Méridien de Paris est un événement à ne pas manquer, d’autant plus qu’il a déjà profité de l’occasion pour nous présenter sa fille Syreeta qui chante, compose et est également musicienne professionnelle. Encore un motif pour le grand père de rouler des mécaniques tout là haut…!
Sur cet opus de grande qualité, donc, douze nouvelles compos à l’accent spécifique qui nous plongent dans une atmosphère sudiste où le vaudou, les marais, le bayou et les alligators ne sont jamais très loin… Je ne serais d’ailleurs pas surpris si Dave Robicheaux, le héros de James Lee Burke, écoutait, en ce moment, le même disque que moi, au fond de son pick-up. Et l’apport de la section cuivre, dans certains morceaux, est un grand plus qui teinte certaines chansons d’un bleu plus proche de Chicago que de la Louisiane. Une véritable invitation à prendre l’avion et à partir là-bas, à la rencontre de la famille en question…et des autres, car celle-ci n’est évidemment pas la seule à compter plusieurs musiciens parmi les siens. Je pense à la famille Peterson, par exemple.
Un album qui invite au voyage, sans même avoir à prendre de billet d’avion.
Deux ans après un retour fracassant marqué par trois Awards décrochés avec l’album ‘Let Life Flow’, Kenny Neal a définitivement tourné le dos à ces cinq années de galères qui l’avaient durement éprouvé, marqué. Le titre de l’opus, ‘Let Life Flow’, était d’ailleurs la signature d’un homme qui avait non seulement décidé de jouir de la vie comme elle venait, mais en se consacrant à nouveau à fond à la création musicale.
De tout cela, le garçon allait en sortir un premier opus couronné par trois Awards, avant ce nouvel album au titre tout aussi évocateur que le premier, ‘Hooked On Your Love’. Sur les douze titres alignés ici, Kenny Neal en signe huit, reprenant au passage le très rythmé ‘If Walls Could Talk’ signé Robert Miller et le lumineux ‘New Lease On Life’ de William Bell qui sonnent tous deux comme des messages que Kenny voudrait nous faire passer. Ha oui, si seulement les murs pouvaient parler…
Au travers des douze titres de cet opus, le natif de la Nouvelle Orleans revisite tous les styles qu’il affectionne, du boogie au blues le plus suave, le plus chaud, le plus tendre, comme ce ‘Things Have Got To Change’ qui sonne comme un aveu de l’artiste. La voix et la gratte sont à l’unisson et brûlent du même feu, épaulées par des musiciens du meilleur cru et notamment quelques représentants du clan Neal: Tyree à la guitare, Darnell à la basse, Frederik aux claviers et Kenny Jr. aux percussions. Les cuivres sont incendiaires et les chœurs envoutants, comme si Kenny Neal voulait mettre le feu à un passé révolu et ne composer que pour un avenir qu’il souhaite radieux, même si le dernier titre, ‘You Don’t Love Me’, aurait pu laisser à penser que le négatif pourrait être de retour.
Véritable périple dans le blues, passant de la Nouvelle Orleans à Chicago après un virage par la Louisiane, Kenny Neal nous fait voyager au rythme de douze titres sélectionnés pour leurs couleurs chaleureuses et leurs teintes magnifiées. Enregistré au Beech House Recording de Nashville par Mike Nevers et mixé à Chicago par Blaise Barton, l’opus vous étonnera par sa richesse et sa puissance musicale. Comme si vos enceintes prenaient vie. Une nouvelle vie, comme Kenny Neal.