JULIE ABBÉ – Out Of The Ashes

Autoproduction
Folk
JULIE ABBÉ - Out Of The Ashes

Native de notre marais poitevin, la chanteuse, guitariste, autrice et compositrice Julie Abbé s’est expatriée dans le port de Bristol, England, ses 22 ans à peine sonnés, afin d’y étudier le jazz vocal au Goldsmith College. S’immergeant bientôt dans les actives scènes locales, elle s’y est investie dans une demi-douzaine de formations aux orientations diverses (du latin-jazz au swing, en passant par le folk au sein du trio Melusina). Après un premier album solo remarqué en 2020 (“Numberless Dreams”), elle nous revient avec une œuvre placée sous le signe de la résilience, après une rupture amoureuse que l’on devine douloureuse (comme l’indique son titre). S’exprimant alternativement dans sa langue maternelle et en anglais, elle ouvre cette nouvelle livraison par trois compositions dans celle de Molière. Portées par les balais et la guitare de James Grunwell (ainsi que la contrebasse de Sam Quintana), les “Lanternes d’Or” qui ouvrent le ban charrient un rythme manouche paresseux, où la clarinette d’Ewan Bleach donne la réplique au timbre langoureux d’une Julie enamourée. Le bansuriste Paul Johnson signe la musique de la valse mélancolique “Au Bord De La Rivière” (dont Miss Abbé écrit les paroles, tandis que les onze autres plages s’avèrent toutes intégralement de sa plume). Comme l’indiquent les liner-notes, le bansuri est une flûte indienne en bois, et c’est le même Johnson, manifestement versé dans les instruments orientaux, qui en manipule pas moins de quatre distincts sur l’ondulant “Mélusine”. Le volet anglophone s’ouvre sur le bluesy “Take Me Away”, où l’on perçoit soudain ce qui captiva les auditoires de notre expat, quand elle se produisait en ouverture des éditions 2022 et 2023 du festival de Glastonbury. Là où d’aucun(e)s se livreraient en pareil contexte à d’outrageuses démonstrations épate-gogo (que sa technique lui autoriserait sans doute), Julie Abbé s’imprègne au contraire de la mélodie jusqu’à l’incarner, comme elle le confirme sur le nostalgique “Shadows” qui suit. Sans paroles, mais où elle utilise sa voix comme un pur instrument, au fil d’une mélodie Balkanique que n’aurait sans doute pas renié Goran Bregovic. Bien qu’également signé Abbé, le three-steps “Hushing The Blues Away” évoque les standards old-time country qu’interprétait la Carter Family au fin fond des Appalaches dans les années trente au siècle dernier. La clarinette d’Ewan Bleach y fait à nouveau merveille aux côtés de la voix de la patronne, et “Songs Of Love” poursuit sobrement dans la veine folk américaine, avec un épique solo de guitare de James Grunwell (dont on nous précise qu’il fut “composé” par un certain Nick Rasle). Le swing manouche repasse en mid-tempo, pour un “Summer Child” où se distinguent à nouveau les six cordes de Grunwell et le saxophone de Bleach. Le lancinant “OUT” (en lettres capitales) agit comme la catharsis au cœur du processus à l’œuvre dans ce disque. C’est la voix de celle qu’on a déçue, que l’on a trahie, et qui accuse son bourreau, encore meurtrie,… Et c’est sans doute aussi la plage la plus singulière de cette collection, tant le crescendo déchirant des guitares électriques et du solo vrillant de Bleach y évoquent de grands torturés tels que Peter Hammill, au temps de Van Der Graaf Generator. Second “instrumental” en lice (car à nouveau chanté sans paroles), l’apaisant “Medicine Tune” prend des accents médiévaux, avec le duduk et le bansuri de Johnson. “Medusa” se love pour sa part dans des atours doucettement klezmer via la clarinette de Bleach, avant qu’un “Incantation” gorgé d’espérance ne referme cet album doux-amer sur un rai ensoleillé. Il se pourrait donc bien qu’il existe encore une vie après l’amour, semble y conclure in extremis la plus anglaise de nos compatriotes.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, April 19th 2024

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