JOHN PRIMER & BOB CORRITORE – Ain’t Nothing You Can Do!

Delta Groove
Blues

Vous aimez le Chicago Blues ? Vous imaginiez donc rester planqué jusqu’à la fin de vos jours dans un espace-temps figé entre 1949 et 1983, et peuplé des ombres des géants qui arpentaient alors les clubs de la windy-city. Ce sentiment ne vous tourmentait guère, puisque vous estimiez disposer de suffisamment de cartouches pour pouvoir tenir jusqu’à cette issue fatale. Croyez bien en toute ma sympathie, mais il va néanmoins falloir réviser votre jugement, car en dépit de vos certitudes, cette musique se conjugue toujours au présent. John Primer fit certes ses classes auprès de Muddy Waters et Magic Slim, mais le bougre demeure non seulement vivant, mais fichtrement prolixe. Quant à l’harmoniciste Bob Corritore (lui aussi natif de Chicago), il figure sur plus de 90 albums à ce jour (!!). Déclinons le reste du casting : Brian Fahey (drummer des Paladins), Henry Gray et le regretté Barrelhouse Chuck au piano, Chris James et Big Jon Atkinson aux six cordes additionnelles, et deux bassistes en alternance. Les slide licks caractéristiques de McKinley Morganfield zèbrent le “Big Leg Woman” de Johnny Temple ainsi que “When I Leave Home”, où le timbre vocal de John Primer accuse la patine que requiert ce genre de piste. Les admirateurs éplorés de Muddy ploient sous l’émotion, mais redressent bientôt l’échine sous l’inflexion des shuffles “Gambling Blues” de Magic Slim et “May I Have A Talk With You” de Howlin’ Wolf. “Harmonica Boogaloo” est l’instrumental au fil duquel Bob Corritore rend brillamment hommage à deux de ses mentors, Junior Wells et James Cotton. La plage titulaire s’inscrit à nouveau dans la facture de Muddy, avec le bénéfice d’un solo 100% barrelhouse du vétéran Henry Gray (92 ans aux fraises !), augmenté de celui de Big Jon Atkinson, manifestement déterminé à s’inscrire dans le sillage des Jimmy Rogers, Pat Hare et Luther Johnson qui le précédèrent en pareil territoire. Quatre ans après leur unanimement célébré “Knockin’ Around These Blues”, nos Chicago-killers favoris récidivent donc avec brio. Comme l’indique le titre à bon escient, on ne peut tout simplement pas y résister : succombez à la tentation !
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Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
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Album à retrouver ici, sur le site de Bob Corritore : “JOHN PRIMER & BOB CORRITORE – Ain’t Nothing You Can Do!”
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