JOHN FUSCO – Borderlands

Rocket 88 Records
Americana
JOHN FUSCO - Borderlands

S’il est surtout connu par delà son État de semi-résidence (l’Arizona) en tant que scénariste à succès pour l’industrie cinématographique (qui lui doit les scripts de “Crossroads”, “Young Guns”, “Thunderheart”, “Loch Ness”, “Marco Polo” et “The Highwaymen”, parmi une dizaine d’autres), John Fusco est également musicien, chanteur et songwriter. Voici déjà son troisième album, après le double “John The Revelator” paru l’an dernier, et “John Fusco & The X-Road Riders” en 2019. Prolongeant ses talents de storyteller dans ses compositions, il nous en livre neuf nouvelles, avec le soutien du producteur et arrangeur George Walker Petit (dont les états de service incluent également des collaborations avec Boz Scaggs et Michael McDonald). Tandis que John compose, chante et assure les claviers, Petit en fait autant à la guitare, à la basse et aux percussions, tandis que Russ Lawton (du Trey Anastasio Band) y tient les baguettes et les balais. Aussi amples et épurés que les espaces que ses chansons évoquent, la production et les arrangements mobilisent tour à tour les éléments nécessaires aux climats respectifs de chacune d’entre elles (ocarina, tambourin, mandoline, marimba, cuivres, accordéon, congas, slide…), pour une americana vibe de bon aloi. Dès l’ouverture du réquisitoire “Coyote Man” (avec le cri caractéristique de l’animal, qui revient aussi en conclusion), les guitares de Petit à l’unisson adoptent une franche tournure sudiste, rappelant celles de Skynyrd au demi-siècle précédent. Le timbre voilé de Fusco sied parfaitement aux tex-mex “Dance Of The Seven Veils” et “Knighted By The Queen”, dont Willy de Ville aurait sans doute goûté les accents mambo et flamenco, tandis que les paroles du premier transportent le destin tragique de Saint Jean-Baptiste sur les rives du Rio Grande, et que celles du second dépeignent une insatiable croqueuse d’hommes. La slide électrique de Matthew Backer se joint aux six cordes de Petit et au Hammond B3 de Fusco pour le bluesy “Bad Luck Rides Shotgun”, qui n’aurait déparé nul enregistrement des regrettés Allman Brothers. John passe ensuite au piano pour le parabolique “Horseback Jesus”, auquel l’accordéon de Michael Hartigan confère un certain cousinage avec Tom Waits. Le sentimental “Cowboy Picture” s’impose comme un de ces instant standards dont le regretté John Prine était coutumier : le genre d’évocation nostalgique dont la trame et le refrain s’impriment instantanément dans votre cortex, pour ne plus s’en effacer. Avec leur beat de canasson et le renfort du violon et de la mandoline de Patrick Richard Ross, le marmonné “Countrified Noise” et “Run, Rez Dog, Run” s’inscrivent dans la ligne country du J.J. Cale de “Naturally”, ainsi que celle du Dylan de “Blood On The Tracks”. Le languide et pénétrant “Cyanide Whisky” nous entraîne ensuite chez Ry Cooder, grâce à la slide gouleyante et au dobro de Matthew Backer (ainsi qu’à la lead perforante de Petit), pour assimiler certaines addictions à de non moins toxiques relations affectives – blues and booze, en somme. Fusco et Petit concluent cet excellent album sur leur adaptation du standard gospel “Ain’t No Grave”, avec la choriste Ashley Betton pour seul renfort. Un disque puissant, dont la qualité des textes (judicieusement imprimés sur le livret) se hisse au niveau de sa réalisation sonore et musicale: americana lovers, sus!

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, October 23rd 2022

::::::::::::::::::::::::::::::

Album à commander ICI

Un album chroniqué également (en anglais) chez nos amis de Americana Highways, ICI