H.C. McENTIRE – Eno Axis

Merge / Modulor
Americana
H.C. McENTIRE - Eno Axis

Originaire de Caroline du Nord, H.C. McEntire fut élevée dans la pieuse ruralité d’une communauté fondamentalement chrétienne. Ayant débuté sa carrière de musicienne et autrice-composititrice au sein de formations semi-acoustiques telles que Bellafea et Mount Moriah, elle n’enregistra son premier album solo (“Lionheart”) qu’en 2018, avant d’embarquer pour deux ans de tournées à travers le monde en tant que choriste d’Angel Olsen. C’est dans le cadre d’une ferme centenaire (dans les bois de Durham, non loin de sa région natale) que H.C. McEntire s’est posée pour enregistrer son successeur, dont le titre évoque la rivière qui la jouxte. Rien à voir donc avec l’homonyme bidouilleur de sons qui officiait sur les premiers Roxy Music, avant de faire la carrière que l’on sait … Activement engagée au sein de la communauté LGBTQ (comme ses consœurs Mary Gauthier et K.D. Lang), elle place ce second effort sous le double signe de la pastoralité et de l’élan amoureux. C’est sous cet angle dual qu’il faut entendre le majestueux “Hands For The Harvest” qui ouvre le ban sur un rythme de valse lente, porté par un piano et une pedal-steel de fin de bal. “Footman’s Coat” rumine sur les occasions passées et le statut subalterne qu’elle endossa plus souvent qu’à son tour, tandis qu'”High Rise” emprunte avec bonheur le registre honky-tonk de figures tutélaires telles que Willie Nelson, Dolly Parton et Emmylou Harris. Il n’est que temps de rendre justice à la demi-douzaine de musiciens qui l’accompagnent pour l’occasion, au premier rang desquels le banjoïste Nathan Bowles, le pedal-steel master Allyn Love et le guitariste et pianiste Luke Norton. Ce dernier assure en outre les chœurs auprès de Mario Arnez et Justin Morris sur le poignant “River’s Jaw”, qui rappelle la veine dark-pop de la Marianne Faithfull de “Broken English”, avec son echo-delay de surf-guitar digne de Chris Isaak. Ces harmonies vocales s’avèrent décisives sur les languides et aériens “One Eye Open” et “True Meridian”, avant que “Final Bow” ne suscite le retour de la subtile section rythmique (évoquant celle des Stray Gators de la trilogie “Harvest”-“Time Fades Away”-“Homegrown”), sur cet hymne effectivement digne du Neil Young de la grande époque. Master stroke plus évident encore, le terrassant “Time, On Fire” porte le coup de grâce sous la forme d’un country-classic anthem en puissance, avant que la dame ne ferme le ban sur une relecture inattendue du “Houses Of The Holy” de Led Zeppelin (revisité ici en mode générique de fin de “Mullholland Drive”). Vocaliste aussi poignante que déterminée et songwriter émérite, H.C. McEntire transforme magistralement l’essai avec ce superbe album en clair-obscur, traduisant avec acuité les soubresauts de l’âme. On en redemande.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, July 16th 2020