Flyin Saucers Gumbo Special – Nothin’ But

Fatso Records / Quart De Lune / L’Autre Distribution
Louisisana R&B

Quand on parle de blues depuis l’Europe et que l’on évoque sa topographie, ce sont le plus souvent des fleuves et des marais qui viennent à l’esprit, Mississippi en tête bien sûr. Mais on devrait sans doute se préoccuper autant d’autres espaces aqueux, comme les mers et les océans. Pour preuve, le blues de la West-Coast s’avère aussi distinct de celui de la côte est des États-Unis que peuvent l’être les océans Atlantique et Pacifique. De même chez nous, les deux pôles majeurs pour le blues hexagonal s’avèrent de plus en plus côtiers. Le Languedoc, la Garonne et la Bretagne sont de longue date d’ardents foyers du blues hexagonal (Awek, Rosebud Blue Sauce, Fly & The Tox, Doo The Doo…). Quant à la Côte d’Opale des Hauts de France, avec ses Blue Caps (Gris-Nez et Blanc-Nez), elle s’affirme depuis quelques années en tant que vivier des formations à note bleue au pays du Potjevleesch (Blues Eaters, Nico Duportal, Thom & The Tone Masters…). La capillarité avec l’effervescente scène blues belge flamande n’y est sans doute pas étrangère, et l’on pourrait donc parler de scène Atlantique pour les premiers, et de son équivalent de la Mer du Nord pour les seconds. Allez savoir pourquoi, on ne recense guère de formations blues limitrophes à ce côté de la Manche (sa rive anglaise en garantissant il est vrai déjà son lot). Tandis que le blues méridional s’avère surtout Italien, c’est sur l’axe BBT (Bretagne-Bordeaux-Toulouse) que s’appuient depuis deux décennies les Flyin Saucers Gumbo Special. Le bien nommé “Zydeco Train”, ainsi que la plage titulaire, “Gonna Roll” et “Hey Tout Kelkun” (tous de la plume du pilier Fabio Izquierdo) donnent le ton de ce huitième album: piano à bretelles garanti 100% bayou, que ce soit en mode trépidant (le plus souvent) ou lancinant (“Moonshine”). La section rythmique qui a établi la réputation du combo (Charlie Duchein, basse, et Stéphane Stanger aux baguettes) conserve la charge de la salle des machines pour le plus grand bonheur de nos hanches et rotules (d’autant que Fabio demeure pour sa part l’un des meilleurs souffleurs de braises européens à l’harmo). Signés et chantés par Le Goff, “Mr Bartender” et “Keep On Hoping” évoquent le funk moîte des Meters de Zigaboo Modeliste et de Little Feat (avec son Hammond B3 entre Jimmy Smith et James Taylor Quartet, et ses cuivres charnus à souhait), tandis que “Louisiana Girl” du nouveau guitariste, Lucas Gautier, emprunte le swamp beat buté que popularisa Creedence voici un demi-siècle. C’est encore lui qui fourbit cette New-Orleans ballad cuivrée façon Dave Bartholomew (respect éternel), “How Can I Try”, sur laquelle il exprime ce qu’il doit à des stylistes tels que Jimmie Vaughan et Guitar Slim. Du grand art, et l’un des sommets du disque, avec le funky et syncopé “Do What You’re Supposed To Do” (et sa wah-wah caquetante sur tapis de cuivres rutilants). Seule reprise de cette collection, “High Blood Pressure” rend justice à ses créateurs (Huey “Piano” Smith & The Clowns), avec ses chœurs doo-wop sur beat claudiquant. Bref, les esprits de Clifton Chenier, Buckwheat et Archibald se trouvent en de bonnes mains sur la rive opposée de celle qui les vit naître, et si les crues de la Garonne ne s’avèrent pas aussi dévastatrices que celles du Mississippi, les barbecues sur ses berges n’y sont désormais pas moins épicés. L’une de nos formations les plus performantes à l’export: everybody, boogaloo and jive!

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, July 1st 2019

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